mardi 27 janvier 2009

George Harrison & Friends - The Concert for Bangladesh (1971)

"My friend came to me with sadness in his eyes..." George Harrison, tout frais ex-Beatle, est abordé au début des années 70 par son grand ami et maître Ravi Shankar qui lui parle de la situation dramatique du Bangladesh en proie à la guerre civile. Harrison, touché, réfléchit avec son Shankar à ce qu'ils pourraient faire pour apporter une certaine médiatisation autour de ce conflit et pouvoir venir en aide à la population sinistrée.

C'est à partir de là que va naître le Concert for Bangladesh, le premier concert de rock à caractère humanitaire et caritatif de l'histoire (Eh non, ce n'est pas le Live Aid de Bob Geldof). L'idée est simple : faire deux concerts avec George Harrison en compagnie d'autres guests célèbres et reverser les recettes à l'UNICEF.

Ces deux concerts auront lieu le même jour (un l'après-midi, l'autre le soir) : le 1er août 1971 au Madison Square Garden de New-York.

Harrison appelle alors tous ses potes, non sans mal pour certains : Billy Preston, Leon Russel, Ringo Starr, Eric Clapton (qu'il ne fut pas aisé d'arracher d'Angleterre), Bob Dylan (qu'il sort de la retraite). Les deux autres ex-Beatles, Lennon et McCartney, ont également été conviés mais ne sont pas venus pour des raisons un peu obscures. McCartney se voyait mal apparaître sur scène avec ses anciens compères alors que les procès sur la déchirure des Beatles battaient leur plein et on dit qu'Harrison aurait demandé à Lennon de venir à condition que Yoko Ono ne chante pas, ce qui aurait évidemment déplu à l'ex-leader des Beatles (mais d'autres raisons sont également invoquées Lennon). Dommage en tout cas.

Ces têtes d'affiche seront accompagnées d'autres vieilles connaissances d'Harrison : Klaus Voormann, Jesse Ed Davis, les Badfinger, Jim Keltner, Carl Radle, Jim Horn et ses cuivres... soit la plupart des musiciens qui ont participé à son premier album solo dont on avait déjà parlé ici "All Things Must Pass".

La première partie du concert est confiée à Ravi Shankar et sa troupe qui proposent un long morceau de musique indienne dédié au Bangladesh. Ensuite, le reste du concert offre une majorité de chansons de George Harrison (Beatles ou solo), laissant une place également à Ringo Starr, Billy Preston et Leon Russell, ainsi qu'à Bob Dylan qui bénéficie d'une petite partie rien qu'à lui avant la fin.

Un double album issu du concert (produit par l'incontournable Phil Spector) est sorti ensuite, réédité et remasterisé il y a qques années avec en bonus un superbe coffret DVD (avec le film réalisé par Saul Swimmer, un proche des Beatles). Nous allons donc nous intéresser à tous ces objets, tout en décrivant aussi le concert, chanson par chanson.

Le premier double album qui était sorti avait une pochette très simple et évocatrice : un petit enfant bengali tout maigre assis devant une grande assiette vide. A l'intérieur, un livret assez fourni propose tout d'abord une explication de la situation politique du Bangladesh en 1971. Ce petit Etat situé à l'est de l'Inde appartenait alors au Pakistan (situé lui complètement de l'autre côté) et a demandé son indépendance. Cela n'a pas été accepté par le dictateur pakistanais de l'époque qui a procédé à des rafles sanglantes à l'encontre de ses opposants, et les civils n'échappent pas à l'épuration. Il y aurait eu des centaines de milliers de victimes...

On trouve ensuite un long témoignage de Ravi Shankar (une interview datant de qques jours après le concert) qui est d'origine Bengali. Très perturbé par les violences de mars 1971, il voulait vraiment agir. A ce moment-là, il était aux Etats-Unis pour finaliser la bande musicale du film "Raga". Les gens des ONG et autres organisations humanitaires lui ont alors suggéré de donner une performance caritative. Il s'est alors adressé à George Harrison qui se trouvait par là également. Au départ, il lui demandait conseil, de l'aider à contacter des artistes. Harrison, fortement touché par les évènements, a décidé alors de prendre part lui aussi au projet en appelant ses plus proches amis musiciens, et c'était joué.

Le reste du livret propose de nombreuses photos en couleurs issues du concert et illustrant chaque chanson. Au dos, on trouve deux photos très symboliques : l'une montre la somme totale des recettes (243 518, 50 $) remise à l'UNICEF, l'autre montre un étui de guitare ouvert, rempli de boîtes et sacs de nourriture à destination du Bangladesh.

La réédition de ce double album a une maquette complètement différente avec une couleur orange dominante. George Harrison est cette fois sur la pochette du boîtier (ça aurait quand même été mieux de garder le petit garçon, mais celui-ci se retrouve au moins sur la couverture du livret). Dans le livret, Ravi Shankar intervient à nouveau, mais cette fois-ci, son témoignage est de 2005. Il évoque à nouveau le concert en appelant à la mémoire de George Harrison, en expliquant l'importance de cet évènement et en le remerciant pour tout ce qu'il a fait.

Ensuite, une page est dédiée à nouveau à l'explication du conflit au Bangladesh puis c'est le président du fonds américain pour l'UNICEF, Charles Lyons, qui s'exprime pour donner des précisions sur la manière dont ont été utilisé les recettes. Il explique que ces recettes ont été multipliées grâce aux royalties des musiciens, aux ventes du CD et DVD ainsi que des dons.

Ici et là, on trouve aussi des photos et des citations de George Harrison à propos du projet. il dit notamment que l'idée est bien de Ravi Shankar et qu'il a passé un mois et demi au téléphone pour convaincre ses amis de venir participer au concert. D'autres citations récentes sont présentes, Ravi Shankar parle de l'émotion qui régnait sur scène, Ringo Starr de la beauté de l'évènement et de la qualité de l'auditoire, Eric Clapton de la liberté des musiciens à cette époque et de leur fierté d'accomplir ce geste sans penser à eux-mêmes pendant 5 minutes, Leon Russel d'une expérience de haut niveau du début à la fin.

Outre le son remasterisé, cette réédition propose un titre bonus : "Love minus zero/No limit" de Bob Dylan, interprété par ce dernier lors de son passage sur scène mais non présente sur le double CD original.

Pour finir, parlons du coffret DVD. Il est hautement luxueux ! On y retrouve, en pagaille, un autocollant Apple (!), un poster de l'affiche du concert (très très sobre), un fac-similé en carton de la feuille sur laquelle Harrison a écrit les paroles de la chanson "Bangladesh", des photos des différents participants du concert sous forme de cartes postales mais aussi un riche livret. Ce dernier est quasiment le même, en plus grand, que celui du CD sauf qu'il offre un peu plus de photos et de citations.

On recommande déjà l'acquisition de tous ces beaux objets d'autant plus que toutes les recettes continuent encore aujourd'hui d'être reversées à l'UNICEF. :-)

Commençons ainsi la revue chanson par chanson de ce concert d'anthologie, et en plus, y a les images donc tant mieux !

Avant que le concert ne commence, le DVD propose l'extrait d'une conférence de presse donnée par George Harrison et Ravi Shankar avant le concert. Harrison rappelle que le conflit au Bangladesh est très peu médiatisé et qu'ils vont faire ce concert pour les gens qui sont là-bas. Un journaliste lui demande pourquoi il a choisi ce conflit là et pas un autre, il répond que c'est juste parce qu'un ami le lui a demandé et c'est tout.

Ensuite, on a une vision de la salle vide pendant les préparatifs avec George en voix off qui explique que c'est Ravi Shankar qui a eu l'idée de cette action et qu'ensuite, il s'est occupé de l'organiser "with a little help from my friends". Tandis qu'on voit les principaux acteurs du concert en train de répéter sur scène, Harrison indique qu'il les a fait venir parfois de très loin, sans être payés, que le concert a rapporté seulement 250 000 $ mais que le disque en a rapporté beaucoup et qu'au moins, cela avait permis de nourrir ceux qui avaient faim. Et le concert peut enfin commencer...

Il faut savoir avant toute chose que le concert retranscrit dans ce DVD comporte des morceaux qu'on peut penser du second concert (celui du soir), sans doute car les musiciens devaient être plus décontractés. Mais à aucun moment, on ne sait vraiment de quelle captation il s'agit.

On retrouve d'abord George Harrison, tout seul, au micro, acclamé par toute la salle qu'il remercie. Il annonce le programme, avec une première partie consacrée à de la musique indienne (comme pour tous ses futurs concerts en solo), un duo de sitar et de sarod. Il dit que cette musique est plus sérieuse que la leur et il demande donc le calme pendant cette partie. Il introduit ainsi Ravi Shankar au sitar et Ustad Ali Akbar Khan au sarod. Il y a aussi Alla Rakha au tabla et Kamara au tamboura.

Puis George s'éclipse, laissant Ravi Shankar présenter sa partie. Ce dernier indique que sa musique exige une écoute concentrée. Il demande au public un peu de patience, connaissant le goût évidemment plus prononcé des auditeurs pour la suite du show. Avec sa musique, il voudrait faire prendre conscience aux gens de la gravité de la situation au Bangladesh (pendant ce temps, le DVD propose des images de personnes bengalis en déplacement ou d'enfants malades...). Shankar enchaîne en expliquant qu'ils vont jouer un "dhun", câd une mélodie inspirée d'un air folk du Bangladesh, suivi d'un gat rapide, en teentaal en 16 temps (ne me demandez pas d'explication !!!). Enfin, il demande aux gens de ne pas fumer pendant le concert !

Puis vient le moment cocasse... Les musiciens prennent qques secondes pour s'accorder, s'arrêtent et le public se met à applaudir ! Ravi Shankar le remercie en leur disant que s'ils apprécient autant l'accordage, il espère que la musique lui plaira encore plus ! ;-)

- "Bangla Dhun" (Shankar) : Il s'agit donc d'un très long morceau de musique indienne, de près de 15 minutes. Je ne suis pas un spécialiste donc je n'ai pas trop d'avis critique à apporter si ce n'est que ça s'écoute très facilement. Il y a une sorte de rengaine qui revient régulièrement, jouée au sitar par Shankar. Le joueur de sarod l'accompagne de solos, lui répondant et une sorte de duo se joue entre les deux, avec les percussions derrière (le joueur de tabla tape sur ses deux tambourins avec ses doigts très rapidement, fascinant !). Tout est une affaire de regards, de mouvements de tête, on ressent beaucoup de complicité entre eux. Le rythme accélère parfois avant de ralentir. On apprécie la technique remarquable des deux musiciens qui ont une vitesse d'exécution impressionnante. Au bout d'un moment, le morceau s'arrête un peu, le public applaudit et les musiciens reprennent de plus belle, sans doute pour la deuxième partie dont parlait Ravi Shankar précédemment. Le final est splendide, la musique allant de plus en plus vite jusqu'au bout. Très beau morceau en tout cas.

Les musiciens saluent et s'en vont, sous une très belle acclamation du public. Puis on voit une jolie image, dans les coulisses du Madison Square Garden, avec notamment Leon Russel et Ringo Starr qui débarquent très tranquillement, suivis de Phil Spector et d'autres personnes dont Allen Klein je crois. Derrière, le bel ange blanc, George Harrison qui tient déjà sa guitare, blanche également...

- "Wah-Wah" (Harrison) : Le public applaudit de plus belle, et la musique résonne dans le noir complet. Le fameux riff de guitare introduit de superbe manière le concert. Puis la lumière vient et le groupe est au complet, avec un George Harrison à l'air déterminé même si légèrement coincé. C'est la chanson idéale pour débuter ce concert, très emballante et puissante, toute en guitares, batteries, cuivres et choeurs. Clapton s'autorise qques disgressions tout à fait sympathiques et funky. On entend pas beaucoup le chant d'Harrison qui semble hurler pourtant dans le micro. Puis solo de saxophone par Jim Horn, très bien réussi. On apprécie aussi les gros plans sur la tête de George quand il chante, très beau avec sa barbichette touffue et ses cheveux longs. Une bien belle intro donc !

- "My Sweet Lord" (Harrison) : George a lâché sa guitare électrique pour une acoustique, place au tube ! Dès qu'il commence les premiers accords, le public adore ! "Hare Krishna" lance George avant que Clapton enchaîne avec les fameux accords de slide, peut-être un peu trop rapidement. Harrison ferme les yeux quand il chante, on le sent très inspiré par cette chanson, véritable prière. Les choeurs interviennent peu après et je dois dire que c'est ma seule critique. Ils ne sont un peu criards et pas très justes, faisant un peu tâche dans ces belles harmonies. Pour la fin, c'est mignon parce qu' Harrison s'est lancé dans des complaintes indiennes, et indique qu'il a fini en jetant un regard complice à Clapton qui reprend la slide et termine le morceau... Un joli moment donc, mais j'aime beaucoup moins les choeurs.

- "Awaiting on you all" (Harrison) : C'est l'un de mes moments préférés du concert. Encore une chanson dédiée à la religion, mais sous forme de gospel enjoué qui touche immédiatement sa cible. Les choeurs sont encore un peu rustres mais passent mieux ici. Cette chanson aurait vraiment pu être un hit également si elle avait été un peu plus mise en avant. George a repris sa belle guitare blanche et ses accords sont très jolis. Là encore, il lève la tête, les yeux fermés, mettant toute sa foi dans son interprétation. Il y a juste une interrogation, dans le dernier couplet, au lieu de chanter "You don't need no churches, you don't need no temples", il ne va pas citer les mots "churches" et "temples". Pour ne pas choquer le public américain ? En tout cas, la performance est très fluide et enlevée, on apprécie beaucoup !

- "That's the way God planned it" (Preston) : Place aux amis un petit peu. Harrison introduit un "ami de longue date", Billy Preston, pour l'un de ses singles de l'époque. C'est l'une des meilleures performances du concert. Non seulement, Preston est un excellent chanteur soul, mais en plus, il apporte une fougue assez unique comparée à ses camarades plutôt sobres pendant tout le concert (à l'exception peut-être de Leon Russell). Sa chanson est un très bon gospel, avec des choeurs qui m'irritent toujours un peu mais bon, ça passe. Puis bon solo d'organe avec bouche grande ouverte et yeux fermés levés vers le ciel... Ensuite, c'est l'emballement ! Preston et son petit bonnet se lève de son siège tandis que la musique s'accélère et se jette au milieu de la scène pour une petite danse totalement improvisée devant ses potes médusés mais qui tentent de garder le rythme ! Il paraît que Phil Spector a totalement paniqué à ce moment-là, se demandant où il était passé. Le public a adoré en tout cas et réservé une ovation méritée pour ce génial organiste. Super morceau et performance !

- "It don't come easy" (Starkey) : Pas besoin de l'annoncer, le splendide riff du début, signé Harrison, suffit. C'est l'un des premiers et meilleurs singles de Ringo Starr qui va chanter à son tour. Le public l'ovationne dès les premiers mots. Bon, il est pas super juste et ce n'est jamais facile de chanter et de jouer de la batterie en même temps, mais il assure pas mal. Mais le morceau a le mérite d'être vraiment excellent avec une bonne partie de cuivres et des supers parties de guitare. La seule chose dommage c'est que Ringo, perchée sur sa batterie, a l'air plus concentré qu'autre chose et semble chanter sans trop de conviction. On l'a vu plus à l'aise !

- "Beware of darkness" (Harrison) : Retour de George au chant, pour une chanson plus calme et "lourde". Une belle chanson, bien interprétée, mais avec toujours ces choeurs un peu incongrus. Puis Harrison laisse place à Leon Russell pour chanter un couplet de la chanson. Ce dernier assure très bien même si le spot sensé l'éclairer n'est pas très bien orienté ! ;-) Un bon morceau, bien cadré avec une interprétation très sobre.

Puis vient le moment de la présentation des musiciens par George Harrison : Ringo Starr, très applaudi et qui aura le droit à qques notes de "Yellow Submarine" jouées au piano par le facétieux Leon Russell, ensuite Jim Keltner, l'autre batteur, à la basse Klaus Voormann dont "beaucoup ont entendu parler sans ne l'avoir jamais vu", plusieurs guitaristes, Mr Jesse Ed Davis, le vieil ami Eric Clapton, cigarette au bec et très applaudi lui aussi, "Leon" au piano, à qui Harrison demande de se lever (!), le groupe Apple Badfinger, les choeurs, les Hollywood Horn Players de Jim Horn, et le malheureux Billy Preston, oublié par Harrison avant que le public ne le lui rappelle !

- "While my guitar gently weeps" (Harrison) : C'était le bon moment pour introduire toute cette magnifique troupe, avant que résonne ce morceau emblématique d'Harrison. De plus, c'était la première fois qu'il était joué en public, d'où la particularité de l'évènement. Le public est évidemment conquis. Bon, Harrison n'apparaît pas très emballé, sans doute un peu tiraillé à l'idée de rejouer un morceau composé au sein des Beatles. Au solo, Eric Clapton n'a plus à se cacher, et il assure comme un chef. Malgré les qques difficultés à gérer les aigüs, on a le droit tout de même à une jolie performance, tout en sobriété, avec un joli final, duo de guitares entre Harrison et Clapton, avec regards complices et sourires de rigueur. Chapeau !

- Medley "Jumpin' Jack Flash" (Jagger/Richards) - "Young Blood" (Lieber/Stoller/Pomus) : Harrison tombe la veste, laissant apparaître sa belle chemise orange, et c'est à Leon Russell d'assurer le show pour deux chansons. A la basse, Klaus Voormann a laissé place à Carl Radle, bassiste de Clapton, et Don Preston, guitariste de Russell et jusque là dans les choeurs, est venu s'ajouter aux guitaristes déjà présents (ce qui en fait 4 électriques !). Russell est très à l'aise et en verve sur le premier morceau des Rolling Stones, avec sa voix rauque et cuivrée. Don Preston joue le solo final de transition avec le second morceau, "Young Blood", originalement interprété par les Coasters mais notamment repris par les Beatles (avec Harrison au chant) à leurs débuts. Russell est encore impeccable, doté d'un très bon groove dans le chant, doublé par ses partenaires guitaristes qui se fendent chacun d'un "You're the one". Après le joli solo chanté de Russell, toute la troupe reprend à nouveau "Jumpin' Jack Flash" pour finir. Un bien joli moment de récréation pour tous les musiciens, ovation méritée.

- "Here comes the sun" (Harrison) : On va encore se détendre ensuite avec ce nouveau morceau d'Harrison, encore un classique d'avec les Beatles. George a repris sa guitare acoustique, accompagné du leader des Badfinger, Pete Ham, également à la guitare acoustique. Aux premières notes, le public est déjà sous le charme, encore plus aux premiers mots. Une bien jolie interprétation d'Harrison, quoiqu'un peu trop rapide. A nouveau, on sent qu'il vacille un peu avec ses chansons d'ex-Beatles, comme s'il avait une certaine pression à les jouer. Mais sa voix reste touchante et son jeu appliqué. Les "Sun Sun Sun here it comes" sont accompagnés des choeurs, pour une fois très propres. Un morceau toujours aussi enchanteur, dommage que cela ne dure pas assez longtemps...

- "A Hard rain's a-gonna fall" (Dylan) : Lorsqu'Harrison annonce "un ami qu'on a tous en commun", Mr Bob Dylan, c'est le vacarme, l'ovation est incroyable. Il est là, habillé en jean de la tête aux pieds, avec sa guitare et son harmonica accroché à la bouche. Derrière, dans l'obscurité, Leon Russell est à la basse, Harrison à la guitare électrique et Ringo Starr au tambourin. Le silence est total, on écoute le Zim, à peine éclairé par une lumière orangée. Il a l'air à l'aise et bien que je ne sois pas non plus un spécialiste de son oeuvre, on sent vraiment qque chose de particulier qui se passe dans la salle pendant son tour de chant. Cette première chanson me plaît beaucoup en tout cas.

- "It takes a lot to laugh, it takes a train to cry" (Dylan) : Nouveau morceau bien sympathique où Dylan s'aide un peu de son harmonica et où Harrison fait doucement résonner ses cordes électriques. Joli moment.

- "Blowin' in the wind" (Dylan) : Un classique donc une belle acclamation dès les premiers mots. Comment ne pas tomber sous le charme de ces ballades sans âge ? Harmonica de rigueur à nouveau et que du plaisir dans les oreilles et devant les yeux, avec un Dylan vraiment impliqué et inspiré.

- "Mr Tambourine Man" (Dylan) : Petite parenthèse pour préciser que ce morceau est très bizarrement absent de la version DVD du concert ! Heureusement, on le trouve sur l'album, juste avant "Just like a woman". Peut-être qu'il ne l'a pas chanté le soir et qu'ils n'ont pas voulu faire de montage ? Toujours est-il que c'est bien dommage car ce morceau, c'est du lourd, l'une des chansons phares du Dylan des 60's. On adore...

- "Just like a woman" (Dylan) : La voix de Dylan est ici encore plus marquée, très nasillarde, avec sur les choeurs (les "Just like a woman"), les douces voix de Russell et Harrison qui s'avancent au micro pour l'accompagner. Encore un très joli moment. Le public semble apprécier énormément, criant des "Encore" "Encore" à foison. En effet, ce morceau clôt la partie de Mr Bob.

- "Something" (Harrison) : Retour d'Harrison et de sa chemise orange pour l'une de ses chansons phares à lui. Les premières notes font frémir le public qui applaudit à nouveau très fort. Harrison y va tout en douceur mais semble beaucoup plus décontracté désormais, regardant souvent ses partenaires avec sourire. Le solo est moins réussi qu'en version album, mais ça passe tout de même, toujours aussi sobre. Jolie performance avant le grandiose final...

- "Bangla Desh" (Harrison) : Harrison a repris sa veste sur le dos et s'en est allé avec ses musiciens, la lumière s'est éteinte, le public redouble d'applaudissements et revoilà tout le monde pour le rappel. Harrison remercie le public de sa gentillesse et s'arme alors de sa guitare. C'est parti pour le climax du concert, cette chanson finale, composée spécialement pour l'occasion : "Bangla Desh". Une oeuvre d'une rare beauté et sincérité. Les paroles rappellent simplement le pourquoi de cet évènement : "Mon ami est venu me voir, avec de la tristesse dans les yeux, et il m'a demandé de l'aide pour essayer de sauver qques vies/Même si je ne pouvais ressentir leur douleur, je savais que je devais essayer et je vous demande de m'écouter pour vous expliquer pourquoi/Bangladesh, où trop de gens sont en train de mourir...". L'interprétation d'Harrison est, sur ce morceau, de loin la plus convaincante. On a l'impression qu'il n'attendait que ce moment pour se lâcher pleinement et crier tout son désarroi devant cette situation. Je crois que sa performance ici est à l'image de ce que sont les vrais moments de sincérité sur des concerts de charité. On sent, en une seule chanson, toute son implication et on est traversé alors par une compassion et un respect vraiment très forts. Le DVD nous y aide bien en montrant à nouveau des images de gens morts de faim et malades pendant la chanson. C'était bien là le but du concert et cette chanson vient le rappeler. Respect. Superbe chanson, très forte, très puissante, avec un excellent solo de saxophone et une basse trépidante. Tandis que tout le monde continue à jouer, Harrison est le premier à poser sa guitare et quitter la scène sous les acclamations du public... C'est la fin...

Le générique de fin, avec les portraits des différents musiciens à la manière du générique du "Bon, la Brute et le Truand" est bien fait, on y entend la fin de "Bangla Desh" ainsi que la longue ovation du public...

Passons aux bonus proposés par l'édition DVD. Tout d'abord un documentaire, "The Concert for Bangladesh Revisited".

Un texte rappelle rapidement la genèse de l'évènement avant qu'on passe à un extrait de la conférence de presse donnée par Harrison et Shankar avant le concert, notamment le moment où l'ex-Beatle explique simplement pourquoi il a choisi de se consacrer à ce conflit en particulier. Puis une sorte de générique intervient sur fond de "Awaiting on you all", avec des images du public du Madison Square Garden dansant et applaudissant, ainsi que des vignettes des différents invités du concert.

Le doc commence par un reportage de la télé américaine, avec un reporter qui se trouve devant la queue immense qui se trouve devant la salle de concert. Il explique qu'il y avait longtemps qu'un concert n'avait attiré autant de foule. Les gens ont attendu depuis la veille pour se procurer des tickets. Certains sont interrogés, une spectatrice veut être bien placée, l'autre est touchée par le conflit, un dernier dit simplement qu'il est "maso" ! Le reporter finit en expliquant que les fans n'avaient pas été aussi excités depuis le dernier concert des Beatles au Shea Stadium.

On a ensuite un court extrait d'une interview post-concert donnée par Harrison à la télévision où il explique comment il s'est impliqué dans l'évènement, illustré par des images du concert, puis retour à la conférence de presse déjà citée. Puis c'est Ravi Shankar qui intervient, dans une interview donnée récemment cette fois. Il parle du conflit au Bangladesh, illustré par des images de l'époque.

Retour d'Harrison qui va plus loin, expliquant que la célébrité des Beatles jouait en sa faveur, citant John Lennon qui l'avait aidé à utiliser ce "pouvoir" de médiatisation pour récolter des fonds. Conférence de presse à nouveau, un journaliste lui demande comment il se sent d'être la star numéro un de ce futur concert, George réplique qu'il a "le trac" ! Puis images de "Something"...

Harrison reprend et insiste sur le fait que le plus important est que cela ait marché, qu'ils ont réussi à organiser ce concert en très peu de temps. Le 1er août a été choisi car c'était le seul jour où le Madison Square Garden était libre ! Il ajoute que les gens sont donc venus très vite, qu'il y a eu très peu de répétitions voire pas du tout.

Jann Wenner, de la revue Rolling Stone, intervient ensuite. Il se rappelle de l'impressionnante énergie qui régnait autour de la salle avant le concert. Retour rapide à la conférence de presse où Harrison se sent honoré que les billets se soient vendus très vite, en qques minutes, et que ce soit notamment dû à son passé au sein des Beatles.

C'est au tour de Lord Puttnam, président d'UNICEF Grande-Bretagne, d'intervenir ensuite. Il dit juste qu'il était super heureux d'être là... Puis Jann Wenner revient et dit qu'il n'aime pas l'expression de "concert de superstars" même si c'était le premier dans le genre. Il ajoute en tout cas qu'il était exceptionnel car c'était la première fois qu'on voyait un ex-Beatle sur scène depuis la rupture. Images de "It don't come easy" ensuite...

Harrison revient en voix off pour dire qu'il a passé deux mois à appeler tout le monde, pour voir qui serait disponible. Il savait qu'il pouvait compter absolument sur les deux batteurs, Ringo Starr et Jim Keltner. Il dit qu'il voyait beaucoup Leon Russell qui lui avait dit qu'il viendrait, puis le groupe Badfinger.

Place à Ringo Starr pour une interview récente (quand je dis récent, c'est qu'elle a été faite spécificiquement pour la sortie du DVD, donc il y a seulement qques années). Il se rappelle de la beauté de l'évènement et du public présent. Jim Keltner, inteviewé récemment aussi, ajoute que tout le monde voulait aider et participer à sa façon : "Qui dirait non à George ?". Puis c'est Billy Preston, lui aussi interrogé récemment, qui explique que George l'avait appelé, lui avait parlé de l'aspect caritatif et qu'il avait été très heureux de participer, d'autant plus qu'il allait jouer avec des personnes avec qui il n'avait pas l'habitude de jouer. Images de "That's the way God planned it" ensuite...

Preston reprend en précisant que si le premier concert avait été excellent, le second l'avait été encore plus car tout le monde était détendu et relâché. Il raconte notamment le moment où il a sauté sur scène de bonheur pendant sa chanson, et de la fureur de Phil Spector qui ne le retrouvait plus.

On passe ensuite à Leon Russell dans une interview récente, il a gardé ses cheveux longs et sa barbe mais qui sont devenus tout blanc ! Il raconte qu'il pensait avoir le trac d'être là, entouré de toutes ces stars mais que finalement, tout s'est bien passé. Images de son medley et des répétitions ensuite...

Il n'explique pas vraiment pourquoi il a fait ces choix de chansons mais dit qu'il en fallait que tout le monde connaisse et que c'était une performance de très haut niveau.

Vient ensuite le directeur de production du concert qui parle des répétitions, survenues qques jours seulement avant le concert, à Carnegie Hall. Mais il manquait un guitariste, Eric Clapton ! Harrison rajoute qu'ils lui avaient réservé une place sur tous les vols des jours précédant le concert mais qu'il n'était toujours pas là. N'étant pas certain de le voir venir, ils ont engagé Jesse Ed Davis, un ancien guitariste de Taj Mahal. Ils ont ensuite envoyé un message à Clapton pour lui dire que ce n'était plus la peine de venir et ce dernier s'est alors enfin décidé à prendre l'avion ! Harrison ajoute que celui-ci est un génie, qu'il a très bien joué sans avoir répété. Images du splendide solo à deux d'Harrison et Clapton sur "While my guitar gently weeps" ensuite... :-)

Justement, Eric Clapton intervient à son tour dans une interview récente où il déclare s'être compliqué la vie, notamment en jouant avec une guitare pas du tout adaptée pour cette dernière chanson. Il explique qu'à l'époque, il sortait d'une sorte de retraite, du coup il était dans un autre monde, à côté de la plaque, et que même aux répétitions, il se sentait trop mal pour jouer. Ensuite, on voit de belles images de répétitions, le groupe jouant "Come on in my kitchen" de Robert Johnson avec un duo Harrison-Russell au chant.

Clapton enchaîne en disant qu'il se sentait mal mais qu'il était quand même venu à cause des gens qui participaient et pour George qui prenait un risque en organisant ce genre d'évènement. Vient Neil Aspinall, d'Apple, ensuite, qui pense que cet évènement à demandé à George beaucoup d'humilité, parce que les Beatles venaient de se séparer, parce que son premier album solo avait été un succès, et paradoxalement, il aurait risqué de voir ses offres refusées... Pas très convainquant le Neil.

Le cas Dylan est exposé ensuite. Harrison explique qu'il a été franc avec lui et qu'il voulait qu'il soit là. Le directeur de production explique qu'il a fallu organiser des répétitions spéciales pour lui. George reprend en expliquant que jusqu'au dernier moment, cela avait failli ne pas se faire, que Dylan avait été très impressionné par la taille de la salle et de toute cette organisation. La réponse d'Harrison fut excellente, il lui dit que lui aussi était impressionné, que c'était la première fois qu'il faisait un truc solo comme ça alors que Dylan y était habitué. Il ajoute que même sur sa petite liste de chansons, il avait marqué "Bob ?" après "Here comes the sun", n'était vraiment certain de rien. Puis Jim Keltner raconte le moment où dans l'obscurité, il a aperçu une ombre, tout de jean vêtu, et il a pu reconnaître immédiatement Bob Dylan s'avancer scène. Harrison savait qu'il était fin prêt... Images de "Just like a woman"...

Ringo Starr reprend la parole et raconte que la prestation de Dylan, durant laquelle il était au tambourin, était assez improvisée mais que ça allait beaucoup mieux pour le second concert. Images de "A Hard rain's a-gonna fall"...

Puis Jann Wenner revient et explique qu'à l'époque de ce concert, la scène rock n'allait pas bien, qu'elle était dans un creux. Hendrix et Joplin étaient morts, il y avait eu le drame d'Altamont, Dylan n'était plus dans le coup, les Beatles s'étaient séparés... Ce concert constitua donc une sorte de tournant. Clapton renchérit en parlant de cette philosophie des années 60 qui s'était effondrée, notamment à cause de l'arrivée des drogues dures dans le monde du spectacle, qui tuaient le "rêve". Wenner rajoute que cet évènement apportait de la réalité au mouvement "Peace & Love", que tout le monde s'est senti bien et fiers de la musique grâce à ce concert.

On retrouve ensuite Ravi Shankar, d'abord dans son discours d'introduction à sa première partie du concert, puis récemment, où il revient sur ce fameux tonnerre d'applaudissements qui a suivi le réaccordage des instruments. Shankar sourit et explique que les gens ont cru qu'il s'agissait d'un morceau, cette musique étant nouvelle pour eux. Images de sa prestation ensuite...

Il revient sur l'émotion de ce moment unique car il a permis au monde entier de connaître le Bangladesh et le terrible conflit qui s'y jouait alors. Après cela, on a une très belle phrase d'Harrison pendant la conférence de presse, il dit que la prise de conscience est pour lui beaucoup plus important que l'argent car même des millions de $ seront peu par rapport à l'ampleur du problème. Images de "Here comes the sun"...

Harrison indique ensuite que les deux concerts ont rapporté 250 000 $, bien plus que les 20 000 $ déjà versés par Ravi Shankar. Charles Lyons, président du fonds Américain de l'UNICEF, explique que cet argent a servi à acheter de la nourriture et des équipements ainsi que des traitements médicaux. Shankar rappelle que ce fut le premier évènement de ce type, Ringo Starr renchérit, puis Billy Preston en disant que ce concert a montré que les musiciens pouvaient changer les choses en jouant ensemble.

Toujours sur le même thème, Ravi Shankar parle de ces centaines de concerts qui ont eu lieu depuis, prenant exemple sur le "Concert for Bangladesh". Evidemment, pour réagir à cela, le réalisateur de ce documentaire a eu la bonne idée de demander son avis à Bob Geldof, qui parle du succès artistique et spirituel du concert. Images de "My Sweet Lord"...

Harrison reprend en parlant de la qualité des musiciens présents, du fait qu'ils aient laissé leur égo de côté pour jouer ensemble, car de tte manière, le but de ce concert les dépassait tous. Charles Lyons, de l'UNICEF, porte ensuite un discours sur l'importance de se donner soi-même, quoiqu'il arrive, même si l'on se sent bien souvent impuissant. Harrison ajoute que les gens ont été poussés ensuite à faire qque chose, à aller recueillir de l'argent, faire des dons, aller aider l'UNICEF. Lyons reprend en disant que ce genre d'action aide à faire réfléchir ensuite les puissants. Puis c'est Lord Puttnam qui rajoute que même si aujourd'hui, les esprits ont changé et sont plus pragmatiques, à l'époque, les gens pensaient vraiment qu'ils pouvaient changer le monde de cette manière, par la musique notamment; et que George Harrison a toujours que les rêves des années 60 pouvaient se réaliser. Ensuite, c'est Kofi Annan, rien que ça, secrétaire général de l'ONU à l'époque du DVD, qui intervient pour dire que ce concert fut une révolution, que maintenant c'est assez commun, mais qu'à l'époque c'était unique et audacieux : "They were pionneers". Eric Clapton conclut en disant qu'à ce moment-là, ils se sentaient fiers d'être musiciens.

Kofi Annan parle ensuite de la chanson "Bangladesh" et de ses paroles qui révèlent l'homme qui est derrière la musique. Images de "Bangladesh" pour terminer le documentaire...

Un documentaire "making of" très bien fait donc, notamment parce qu'il apporte les voix de nombreux participants du concert. A la fin, on comprend bien tout ce qu'il s'est passé, de la genèse au concert en lui-même en passant par l'ambiance et l'état d'esprit des participants et du public. Que demander de plus ?

Sur ce DVD bonus, on trouve également des morceaux joués pendant les répétitions ou lors du concert de l'après-midi et qui ne figurent pas sur le film du concert et sur l'album original. Les voici :

- "If not for you" (Dylan) : Cette magnifique chanson de Bob Dylan avait été reprise de bien belle manière par Harrison sur son premier album solo, "All Things must pass". Les deux amis ont profité de l'occasion d'être réunis pour la jouer ensemble, mais uniquement en répétitions. C'est un moment évidemment magique... Tous deux dans la lumière, jouant et chantant en duo, en se regardant, très décontractés. De plus, leurs voix s'accordent très bien. Un moment très charmant pour une chanson toute aussi charmante !

- "Come on in my kitchen" (Johnson) : Encore les répétitions mais cette fois pour Leon Russell et le reste du groupe qui chantent cette chanson de Robert Johnson. Très joli morceau bluesy où tout le monde a l'air des plus décontracté. Russell mène donc la danse au chant, accompagné sur certaines phrases par Harrison. Très sympa.

- "Love Minus Zero / No limit" (Dylan) : Ce morceau de Dylan est un bonus proposé sur la réédition de l'album du concert et sur le DVD. Il avait été joué lors du concert de l'après-midi, d'où son évincement du film notamment. Dommage parce qu'il s'agit vraiment à nouveau d'une très belle chanson, notamment sur le plan mélodique, avec des airs proches de ''If not for you" et une splendide partie de guitare électrique signée Harrison. Dylan n'a pas l'air des plus à l'aise mais il est très touchant quand il chante et il joue toujours aussi bien de l'harmonica ! Enfin, la basse de Leon Russell est elle aussi délicieuse. La fin est très jolie, puisqu'on voit Dylan terminer le morceau avec un Harrison tout sourire derrière, ravi sans doute de voir son ami bien présent et de la belle ovation offerte par le public pour son chouchou.

Pour finir, on trouve également d'autres petits bonus tels que le making-of du film, expliqué Norm Kinney et Steve Mitchell, deux ingénieurs du son qui ont réalisé le mixage de l'album, mais aussi par Neil Aspinall d'Apple et le réalisateur du film, Saul Swimmer. Tous racontent qu'il s'agissait ici aussi de qque chose de vraiment spécial car peu de concerts étaient filmés par des professionnels à cette époque. Du coup, c'était vraiment très compliqué sur le plan technique. Heureusement qu'il y avait deux concerts, comme ça, ils pouvaient se rattraper sur l'un ou sur l'autre, choisir les meilleures prises. Jim Keltner rajoute que tout le monde était au moins rassuré pour le son car Phil Spector gérait cette partie-là. Ce dernier insistait pour que l'atmosphère soit rendue le plus fidèlement possible, soit avec beaucoup de sons provenant du public. Jann Wenner, de Rolling Stone, ajoute que Spector avait réussi à restituer son fameux "Wall of sound" grâce à la présence de tous ces musiciens (7 ou 8 guitaristes !). Les ingénieurs du son rigolent car ils ont utilisé 44 micros pour tous les musiciens alors que de nos jours, ils en utilisent autant pour une seule batterie !

Puis Jim Horn, interviewé récemment, se remémore la première du film, donnée à Santa Monica, en Californie. Tout le monde était là ou presque, excités à l'idée de se voir dans le film. On voit des images de cette soirée où était notamment présent John Lennon. Puis les ingénieurs du son reprennent la parole et racontent que Harrison, qui avait beaucoup d'humour, voulait laisser un petit qque chose pour les fans, l'un de ces messages cachés dont ils sont friands. Alors ils disent qu'il y a un morceau de bande passée à l'envers, qque part vers la fin de l'album mais que finalement, personne n'en a jamais parlé !

Après le making-of du film, le making-of de l'album ! Il était bien prévu qu'un album sorte même s'il s'agissait là encore de qque chose de spécial. Bhaskar Menon, directeur de Capitol Records à l'époque, raconte qu'il fallait gérer le fait que des musiciens issus de maisons de disques différentes se retrouvent sur le même album. On retrouve ensuite Harrison en interview qui explique qu'il a passé un mois après le concert avec Phil Spector à produire l'album. Evidemment, il y eut des conflits entre les maisons de disques qui se sont battues pour sortir l'album et cela a retardé sa commercialisation, ce qui a fortement déçu Harrison. Finalement, tout est bien qui finit bien puisque l'album est sorti et a reçu le grammy award du meilleur album (on peut voir les images de la cérémonie, Ringo Starr était présent pour le recevoir).

Ensuite, il y a un petit doc consacré au packaging de l'album. La parole est donnée à Tom Wilkes, qui s'en chargé. Il explique son choix de ne pas prendre une photo de George pour illustrer l'album mais plutôt une photo correspondant mieux à l'évènement. Celle du petit enfant qui a été choisie exprimait pour lui une vraie compassion humaine et surtout la réalité de ce qu'il se passait là-bas. Jonathan Taplin, le producteur du concert, ajoute qu'il s'agissait d'un acte courageux qui, au départ, n'a pas été pris au sérieux par les responsables marketing de Capitol. Le livret a été conçu par Tom Wilkes et le photographe du concert, Barry Feinstein.

Un autre petit chapitre est consacré aux mémoires de certains des participants sur ce jour d'août 1971. Il y a d'abord un portrait croisé de Ringo Starr et Jim Keltner qui se sont rencontrés à cette occasion. Keltner raconte qu'il essayait de garder son calme car il était complètement fan de l'ex-Beatle. Ensuite, la plupart des intervenants des divers docs du DVD racontent chacun combien l'ambiance était bonne, l'enthousiasme des musiciens, du public, etc. Ils insistent sur le cas Dylan dont la présence était exceptionnelle. C'est lui qui a demandé à Leon Russell de venir l'accompagner à la basse. Ce dernier s'est alors emparé de l'instrument de Klaus Voormann. Celui-ci rajoute que, pour lui, le passage de Dylan fut le meilleur moment du concert car tout le monde l'adorait. C'est Ravi Shankar qui conclut en parlant de "miracle" à propos de ce concert...

Pour le reste des bonus, une galerie photo sur fond musical, et des génériques musicaux ou non.

Nous en avons donc enfin terminé avec la revue de cet immense objet ! Que dire ? On ne va pas trop en rajouter non plus.

En ce qui concerne le DVD, le coffret est donc tout simplement splendide, avec gadgets à gogo pour une belle collection. Le film est évidemment un très beau document car il permet de voir qques très grandes stars sur scène à une époque où ils étaient encore jeunes et au sommet. L'image est très bonne malgré un éclairage d'époque pas forcément très réussi, avec beaucoup d'obscurité. Côté son, c'est parfait, il n'y a rien à dire malgré la présence de nombreux instruments.

Pour le CD, c'est là encore un bel objet, très complet.

Musicalement, c'est donc un très beau concert. Harrison a choisi ses meilleures oeuvres des Beatles et en solo, il a fait également un bon choix parmi les nombreuses chansons de son "All Things Must Pass". Il y aurait pu en avoir pleins d'autres mais c'est déjà très bien. Par contre, on reste très curieux de pouvoir entendre un jour "Hear me Lord" qu'il a chanté à au moins un des deux concerts mais qu'il n'a pas voulu voir figurer ni sur l'album, ni sur le film, non satisfait du résultat... Dommage. En tout cas, Harrison est en très grande forme, une super voix, une super guitare et sacrément bien accompagné. De plus, il nous offre pour l'occasion une chanson inédite, "Bangla Desh", qui reste l'une des meilleures de son oeuvre solo. Sinon, comme je l'ai dit plus haut, il y a juste les choeurs qui m'agacent ici et là, car ils ressemblent trop à des hurlements.

Pour ce qui est des autres chanteurs, que du bon également. Ringo a choisi sa meilleure chanson solo, celle de Billy Preston est excellente, très bon choix aussi pour Leon Russell et Dylan fait plaisir à tout le monde en interprétant qques uns de ses plus grands tubes des années 60.

Il n'y a donc vraiment rien à jeter, on est emballé du début à la fin. George Harrison peut être fier non seulement d'avoir organisé le premier concert de charité de l'histoire mais aussi que celui-ci soit magnifique. A écouter, encore et encore, en ayant toujours une petite pensée en même temps pour la cause que cet évènement défendait de manière globale : la paix dans le monde.

Les morceaux à retenir : "Wah-Wah", "Awaiting on you all", "That's the way God planned it", "A Hard rain's a-gonna fall", "It takes a lot to laugh, it takes a train to cry", "Blowin' in the wind", "Mr Tambourine Man", "Just like a woman", "Bangla Desh", "Love minus zero/No limit".

jeudi 8 janvier 2009

Concert : Ayo. - Olympia

Après le succès phénoménal de son premier album "Joyful", suivi d'une tournée faites de salles et autres festivals qui aura bien duré 2 ans, Ayo. était de retour il y a qques mois pour un deuxième album "Gravity at last", que j'aurai l'occasion de vous décrire plus tard...

De ce nouvel album, elle avait déjà donné qques pistes lors du concert au Cabaret Sauvage, puis surtout lors de son concert-anniversaire en septembre dernier. Mais cela avait fait un peu flop parce que le public ne le connaissait pas encore.

"Gravity at last" a fini par sortir et le public a maintenant eu le temps de s'en régaler. Sa nouvelle tournée peut enfin commencer... Là, c'est du lourd, elle passe partout en France, et ses trois premières dates parisiennes, à l'Olympia donc, sont déjà complètes (du coup, ils en ont rajouté le mois prochain, et j'y serai aussi !).

Après une répétition générale et en public à Sannois, j'ai ainsi eu la chance d'assister au premier vrai concert de sa tournée, à l'Olympia. C'était mon troisième Olympia avec Ayo. et j'étais assez impatient parce qu'avec ce nouvel album, que j'aime, il y allait avoir forcément plus de matière à chanter.

En première partie, c'est Lucky Peterson qui s'est pointé en compagnie d'une sculpturale et néanmoins excellente batteuse métisse. Lui aux claviers (orgue principalement), elle derrière les fûts donc. Je n'étais pas étonné de ce choix sachant que le musicien de jazz et de soul a travaillé avec Ayo. sur "Gravity at last" et qu'il était déjà là pour l'accompagner lors de son concert-anniversaire.

Mais déjà, il y avait qque chose d'un peu bancal. Lucky Peterson a commencé à jouer deux ou trois morceaux, uniquement des instrumentaux, très jazzy et sympas, à l'air improvisés. Puis il a été rejoint par un chanteur, français, qui a longuement improvisé sur le classique soul "I can't stand the rain" d'Ann Peebles. Jusque là, c'était festif et cool. Puis après, on a senti un peu les choses tourner à l'improvisation totale puisque Lucky Peterson était embarqué totalement dans son trip organique (ou organiste comme vous voulez !), avec la batteuse essayant de suivre comme elle pouvait et surtout le pauvre chanteur complètement abandonné à ne faire que des "yeah yeah yeah" remplis de vibes...

Bien entendu, cela a quand même contribué à bien chauffer le public qui fut excellent d'ailleurs et c'était une bonne nouvelle.

Puis ce fut au tour de la belle de venir nous offrir son récital... Cela a commencé très bizarrement. D'habitude, elle y va doucement, elle s'intègre au public, lui parle, lui dit bonjour, etc... Là, elle est arrivée un peu comme d'habitude puis a enchaîné trois chansons du nouvel album sans transition, à la moulinette presque ! Ensuite, heureusement, elle s'est arrêtée un peu et puis a fait son show habituel, parlant beaucoup en chantant, improvisant, dansant...

Pourtant, autant le début fut très cadré et rapide, autant la suite fut largement dépareillée, et un peu trop même. Bien entendu, elle chantait mais il y avait aussi ces innombrables séquences musicales, plus ou moins improvisées, durant lesquelles elle s'amusait comme une folle à danser devant ses musiciens, mais souvent dos au public, et parfois le temps paraissait un peu trop long malheureusement... Puis il y avait d'autres moments où elle semblait ne plus savoir comment enchaîner les chansons voire quoi chanter. Si bien qu'elle a terminé le concert par deux reprises : "I'll be there" (pour laquelle elle a eu besoin d'un pupitre avec les paroles...) et "I want you back" des Jackson 5.

Autre ratage, la mise en place d'un énorme piano à queue pour le rappel. Disons que c'est surtout son placement qui clochait puisque les 3/4 de la fosse ne pouvaient pas voir Ayo. tandis qu'elle interprétait "Better Days" dessus (et c'est tout, ils ont remballé le piano ensuite...).

Avant cela, nous avons quand même eu le droit à sa fameuse descente dans la fosse ! Et encore une fois, j'étais trop devant pour pouvoir l'approcher. Enfin, je dirais que seulement un ou deux mètres nous séparaient donc ça allait cette fois ! C'est toujours un joli moment, le public est émerveillé...

En conclusion, ça sentait le début de tournée avec encore pas mal de petites choses pas du tout rôdées... Ce qui est pourtant étonnant vu qu'il ne s'agissait pas du premier concert de sa vie non plus ! L'improvisation, c'est bien, et elle peut se le permettre avec les excellents musiciens dont elle dispose (finalement bien plus énergiques que les précédents à part le batteur), mais avec toute la matière dont elle dispose aussi désormais, c'est un peu dommage. Pas mal de chansons sont passées à la trappe, notamment certaines du nouvel album.

On imagine que les choses iront mieux le mois prochain et qu'au moins, elle restera toujours aussi rayonnante et généreuse qu'à chaque fois...