Le festival parisien propose chaque année une affiche assez alléchante avec des groupes connus et donc attirants mais je n'avais encore jamais eu l'occasion d'y mettre les pieds. Manque de temps, d'argent... Oui parce que déjà, c'est un peu cher. 99 Euros les trois jours, ce n'est pas donné. Evidemment, c'est honnête compte tenu des nombreux concerts qui ont lieu mais si l'on est intéressé que par qques groupes et qu'en plus, ce sont des shows de seulement 1h, ça glace tout de suite un peu.
C'était mon cas cette année où The Offspring et MGMT m'intéressaient beaucoup mais ils étaient les seuls de leur journée (samedi et dimanche) alors bof, non, tant pis. Je me suis donc rabattu sur le vendredi, le meilleur jour selon avec plusieurs groupes qui me bottaient bien.
Concernant l'environnement, il est vert, c'est bien mais proche de la forêt alors c'est très touffu et feuillu donc pas terrible pour le sol. Ce n'est que détail certes. Mais l'emplacement n'est pas loin des transports donc un point positif pour compenser. Je m'attendais à un évènement au moins aussi grand que Solidays et en fait, pas vraiment. On a vite l'impression que c'est plus petit, il n'y a que trois scènes dont deux très rapprochées, ce qui empêche pas mal de concerts de se dérouler en même temps. Du coup, ben on poireaute pas mal quand il n'y a rien d'intéressant à se mettre sous la dent. En plus, les concerts ne s'enchaînent pas vraiment bien, trop de moments de latences donc.
Ce vendredi, je voulais débuter en assistant à la prestation de Just Jack mais trop de retard donc tant pis... Mais j'ai vu d'autres choses que voici :
- Keane : J'aime bien ce groupe et son chanteur potelé qui fait de la pop bien huilée malgré l'absence de guitares. Mais là il y en avait un peu et c'est bien le chanteur qui la tenait, de temps en temps. A les écouter, ils ressemblent quand même à des cousins du Coldplay du début, en plus classiques. Leurs chansons sont bonnes mais il est vrai qu'il a eu beau se démener, le chanteur a eu beaucoup de mal à soulever la foule qui reprenait vraiment très timidement ses paroles. Dommage parce qu'ils méritaient mieux. Une prestation solide et convaincante mais de seulement 45 minutes et ça, c'est vraiment lamentable. C'est quoi ce festival ?
Après j'ai écouté les rappeurs d'Asher Roth d'une oreille et c'était pas trop mal.
- Amy Macdonald : Je ne comptais pas non plus m'attarder avec la jeune Ecossaise mais finalement, ce fut une bonne surprise. Je ne connaissais qu'une ou deux chansons de la Miss et le reste fut plutôt bon avec des morceaux souvent bien rythmés et variés. Elle et son groupe ont la pêche et son accent écossais est vraiment super craquant. Son look de fausse blonde en robe paillette détonait beaucoup car ça n'allait pas du tout avec ce qu'elle chantait (folk pop) mais pourquoi pas ? Un bon point pour elle.
- Madness : Les maîtres du rock steady britannique ont donné la plus belle prestation que j'ai pu voir de la journée. Bien entendu, je ne connaissais que qques fameux titre de cet orchestre très cuivré mais le reste fut splendide. Le show fut vraiment magique avec un chanteur parfait meneur de revue, qui s'exprimait de manière poétique voire un peu mystérieuse. Il lançait ses chansons de manière original et s'est même fendu du premier couplet de "Help !" a cappella. Ses musiciens étaient tous géniaux dont plusieurs saxophonistes fous dont un a fini dans les airs, accroché à un élastique. Bref, un show du feu de dieu qui a mis la foule en extase. De "One step beyond" à "Our House" en passant par "Baggy trousers" ou une reprise de Max Romeo, tout le monde a pris son pied avec joie.
- Bloc Party : Ils ont tout de suite donné le ton en annonçant qu'ils ne permettraient pas au public de partir voir Oasis. Alors c'est parti sur les chapeaux de roue avec beaucoup de son et comme d'habitude, on n'entendait pas assez la voix du chanteur. Mais qu'importe, ils sont toujours aussi efficaces avec d'excellents musiciens, notamment le batteur qui, même s'il ressemble toujours à un geek de 15 ans, assure comme un chef derrière ses fûts.
Comme tout bon lâcheur, je n'ai pas vu parce que oui, j'attendais l'évènement Oasis... Mais ça a mal tourné et j'ai malheureusement assisté à un fait historique : la séparation des frères Gallagher. C'était déjà très inquiétant car à 22h, heure du concert, les roadies plaçaient à peine les instruments... Bon... du retard, ok, comme d'hab'. Puis une voix dans le noir, qui annonce que le concert est annulé, que les deux frères ennemis se sont battus dans les loges, qu'ils se séparent... Incroyable... Une blague ? Tout le monde y a cru, s'attendant à voir débarquer le groupe sur scène pour faire la surprise. Mais non, le speaker a répété l'annonce en anglais puis cela a été affiché sur les écrans aux côtés de la scène. Une bagarre, une guitare cassée, un retard, et le ras le bol de Noel quant à bosser avec son frère. C'est fini Oasis. Cela est déjà arrivé par le passé alors espérons que l'on ait assisté seulement à un épisode fâcheux de plus de leur histoire mouvementée mais tellement talentueuse. La poisse pour un festival qui a déjà perdu sa tête d'affiche (Amy Winehouse) au dernier moment deux fois de suite déjà dans le passé !
Madness a fini par remplacer les frères fâchés pour un show similaire au précédent mais j'étais déjà loin, sans plus aucun espoir. Au final, l'impression est donc bien mitigée. L'absence d'Oasis pèse évidemment beaucoup dans mon opinion mais le reste aussi. Ma journée ne fut pas perdue grâce aux éclaircies de Madness et Keane notamment mais le reste ne m'a pas totalement enchantée donc bon, on espère y revenir avec plus de convictions la prochaine fois.
dimanche 30 août 2009
samedi 22 août 2009
Paul & Linda McCartney - Ram (1971)
Le second album solo de Paul McCartney est paru à peine un an après le premier, démontrant toujours plus l'aspect prolifique de l'ex-Beatle. Ici, il crédite sa femme, Linda, comme auteur de l'album parce qu'elle aurait participé activement à l'écriture des chansons, mais aussi pour sa participation musicale (dans les choeurs surtout).
Avec "Ram", McCartney continue sa route post-Beatles en restant très roots. A l'image du diptyque "Plastic Ono Band-Imagine" de Lennon, le second étant une suite "orchestrée" du premier, on peut également voir une certaine continuité entre les deux premiers albums solos de Paul.
Comme pour Lennon, l'orchestration a été beaucoup plus travaillée ici. Mais "McCartney" était aussi beaucoup plus expérimental que "Plastic Ono Band" et "Ram" représente alors un véritable album avec douze chansons tout de même largement plus complètes que sur l'album précédent.
McCartney a donc continué à s'isoler dans sa ferme écossaise pour produire cette oeuvre avant de s'envoler pour New-York afin de l'enregistrer. Cette fois-ci, il n'a pas tout fait tout seul puisqu'il a recruté le batteur Denny Seiwell (futur Wings) et les guitaristes David Spinozza (qui collaborera peu de temps après avec Lennon et Ono) et Hugh McCraken (qui jouera avec de nombreux artistes au cours de sa carrière). Paul et Linda assure seuls la production.
"Ram" va vraiment lancer la carrière solo de McCartney, tout comme "Imagine" pour Lennon. Et cet album va faire particulièrement parler de lui. Sa qualité est indéniable, la touche McCartney est très présente et les Beatles ne sont pas très loin. Cependant, ce n'est que récemment que l'album a fait l'objet d'un véritable come-back sur la scène médiatique avec la presse rock le resortant des archives pour en faire l'éloge. "Ram" est alors devenu le chef d'oeuvre oublié de Paul McCartney dont on a retenu en solo que "Band on the run" ou presque.
Il fera aussi parler de lui au moment présent de l'époque puisque Lennon s'acharnera dessus avec véhémence. J'ai chroniqué "Imagine" avant "Ram" et pourtant c'est bien ce dernier qui est sorti en premier. Et dans "Imagine", Lennon répond furieusement à McCartney, se croyant insulté par son ex-compère. On en parlera dans le détail des chansons.
Lennon se vengera en chanson mais également visuellement. En effet, sur "Imagine", on trouve au dos une photo d'un John hilare en train de tirer les oreilles d'un énorme porc. Il parodiait avec facétie la pochette de "Ram" où l'on voit Paul en train de tenir un bélier (ram en anglais) par les cornes... Le packaging de l'album est très roots, à l'image du contenu. Il y a donc cette photo de couverture et tout autour, le fond, les côtés, sont coloriés, tendance orangée. Très enfantin. A l'intérieur, Il y a un patchwork coloré avec des photos de Paul surtout, dans diverses situations dont en studio. A l'arrière, du coloriage à nouveau et deux photos, l'une de Paul en famille, l'autre de deux scarabées en train de copuler, sans doute une allusion coquine aux Beatles... Les photos sont signées Linda, et les coloriages sont de Paul. Mouais.
"Ram" est assurément l'un des meilleurs albums solo de Paul McCartney, et en voici les chansons :
- "Too many people" (McCartney) : Première chanson de l'album avec d'ors-et-déjà un message fort, adressé à son vieux frère John. C'est l'une de celles que j'aime le moins parce que trop déstructurée, avec des petits bouts différents collés ça et là. Les parties vocales ne sont pas toujours très convaincantes. Musicalement, c'est mieux mais le premier solo de guitare est mou et raté, le second n'est pas vraiment plus réussi. Et la fin est complètement désordonnée. Mais au moins on sent bien que Paul a qque chose à faire passer. Ici, c'est une leçon qu'il veut donner à John notamment. Les paroles sont assez mystérieuses; Paul répétant ce "Too many people" (trop de gens) faisant ceci ou cela, indiquant cela comme un reproche. Et notamment prêchant la bonne parole comme John et Yoko. Il s'adresse sans doute à son ex-compère également quand il lui dit qu'il a eu de la chance mais qu'il a préféré s'en séparer. Je ne pourrais analyser chaque vers mais si littéralement, il n'y ni queue ni tête dans ce morceau, il y a assurément beaucoup de messages codés envers ses ex-compères et autres ennemis de Paul à cette époque. C'est ainsi une entame assez puissante, surtout concernant le texte, mais qui reste encore pas totalement aboutie selon moi.
- "3 legs" (McCartney) : ça se calme tout de suite après avec un petit blues tout mignon. Vocalement, c'est intéressant avec des choeurs toujours bien sentis et Paul chantant tantôt sous vocoder, tantôt de sa voix naturelle. Musicalement, c'est très simple, suivant le schéma classique d'un blues. Côté texte, Lennon s'est encore senti visé mais rien n'est moins sûr. Paul parle de son chien qui n'a que trois pattes et qui ne peut pas courir. Jusque là, rien de très insultant mais après il chante "Quand je pensais que tu étais mon ami / Quand je pensais que je pouvais t'appeler mon ami / Tu m'as laissé tomber". Et après il parle de mouches... Encore un texte à message, beaucoup plus métaphorique et poétique, qui sent bon la ruralité. Mais s'adressait-il à John ? Telle est la question... Loin d'être ma chanson préférée également. Cela ne commence pas très fort mais Paulo va vite se rattraper.
- "Ram on" (McCartney) : McCartney abandonne un peu ses rancoeurs et s'envole dans ce qu'il sait faire de mieux : un petit orchestre, du lyrisme, de l'amour et de la poésie... Chanson patchwork, on entend de tout, du piano, des dialogues, du ukulélé (avant George !), des choeurs sublimes, un sifflement... et un Paul chantant merveilleusement bien l'amour si cela en est. Il indique à qqu'un de donner son coeur à qqu'un d'autre. Un texte court mais dense en mystère... Ce morceau est un petit moment de bonheur tout simplement, une histoire de collage superbement mise en musique par McCartney. Du grand art.
- "Dear boy" (Paul & Linda McCartney) : Le lyrisme continue ici avec la première chanson vraiment bien finalisée de l'album, les précédentes possédant encore un petit côté bricolage. Ici, nous avons un morceau de pop pur, magnifique aussi bien vocalement (au vocoder avec des choeurs à tomber) et musicalement. C'est très homogène du début à la fin. Lennon a encore tiqué ici mais c'est beaucoup moins clair. L'auteur s'adresse à un jeune homme qui aurait manqué sa chance avec une fille et lui indique combien il a fait une erreur : "Je pense que tu n'as jamais remarqué, mon garçon, ce que tu avais trouvé / Je pense que tu n'as jamais remarqué qu'elle était juste la chose la plus mignonne qui soit / Je pense que tu n'as jamais remarqué ce que tu avais trouvé, mon garçon". C'est de toute beauté, un Paul imbattable ici, l'une de ses plus belles chansons. D'une durée de seulement 2 minutes.
- "Uncle Albert/Admiral Halsey" (Paul & Linda McCartney) : Une autre pièce maîtresse de "Ram" que ce petit medley concocté aux petits oignons. McCartney en a réalisé plusieurs durant sa carrière, commençant avec les Beatles (A Day in the Life, le medley d'Abbey Road) et poursuivant cette expérimentation en solo. Reprenant la bonne vieille sauce anglaise avec une ambiance à l'ancienne, Paul crée un véritable conte féérique de près de 5 minutes. Il y a donc ces deux personnages dans le texte. D'abord l'oncle Albert qui a l'air d'un vieux gâteux qu'on essaye de rassurer. Puis l'amiral Halsey intervient peu après. Encore un texte rempli de nonsense mais sur une orchestration divine et des choeurs enchanteurs. On passe d'une ambiance de manière très fluide. Totalement jouissif !
- "Smile away" (McCartney) : Comme d'habitude avec Paul, chaque morceau est unique et nous plonge dans une atmosphère différente du précédent. Ici, on retourne au rock roots sur une base assez classique mais tout à fait plaisante. McCartney prend sa grosse voix, sur des choeurs entêtants et tout charmants, et fait bouger tout le monde. Le texte est simple mais très comique. L'auteur raconte qu'il se baladait un jour dans la rue et qu'il a rencontré un ami qui lui a dit successivement qu'il puait des pieds, de l'haleine et des dents... Je ne sais pas qui dit "Smile away" à l'autre mais c'est viril. Musicalement, c'est très fourni et c'est très bon, avec un solo de guitare très sympa. On a souvent critiqué McCartney quand il se mettait à faire du rock mais là, il s'en sort très bien.
- "Heart of the country" (Paul & Linda McCartney) : Un autre bijou de "Ram" assurément. Avec le rock roots, voici une petite chanson folk, aux accents très rustiques. On sent bien Paul dans sa ferme écossaise en train d'enregistrer ce morceau. Il y chante merveilleusement bien les joies simples de la campagne. Le narrateur y cherche une maison et explique de manière poétique pourquoi. C'est court, épuré et efficace. Une merveille avec juste une guitare et une basse...
- "Monkberry moon delight" (Paul & Linda McCartney) : Et là encore, on passe de la simplicité même à la lourdeur symphonique. Lourd mais bon. Lourd comme l'ambiance heavy psychédélique de ce morceau incroyable. Paul change à nouveau de registre vocal, forçant ici un maximum sur les basses. C'est une chanson atypique une nouvelle fois, reposant sur un texte complètement foutraque mélangeant nourriture et instruments de musique. Paul est au sommet de sa forme et les choeurs évoquent déjà les futurs Wings (comme dans les précédentes chansons d'ailleurs). On apprécie la fin qui part en improvisation.
- "Eat at home" (Paul & Linda McCartney) : Retour à une petite chanson toute mignonne avec texte simplissime ("Chéri, viens manger à la maison") et rengaine imperturbable. Pas le morceau le plus difficile que McCartney ait eu à composer, dans la lignée de tout ces petites pièces faciles qu'il a composé tout au long de sa carrière pour remplir ses albums. Cela n'est pas forcément péjoratif que de dire cela car ceux-ci sont au moins efficaces bien que souvent anecdotiques. "Eat at home" est bien sympatoche, petit rock rythmé avec Linda aux choeurs, mais pas super renversant non plus.
- "Long haired lady" (Paul & Linda McCartney) : Un morceau déjà très Wings avec beaucoup de choeurs "naïfs", un peu enfantins. Paul rend sans doute ici hommage à sa belle avec un texte où il évoque une dame aux cheveux longs et aux yeux brillants. L'ambiance est très folk mais change ici aussi plusieurs fois de tons, notamment avec la partie "Love is long", sorte de refrain à part, chanté de manière répétitive. Mais l'amour reste au centre de la chanson. C'est un peu sans queue ni tête mais ça passe bien quand même avec une fin à la "Hey Jude" où l'orchestre monte petit à petit en puissance afin de s'éteindre.
- "Ram on" (McCartney) : Cela va devenir le petit jeu de McCartney, ajouter plus loin dans l'album une petite reprise alternative d'un morceau déjà entendu. Cela avait commencé avec Sgt Pepper. "Ram on" deuxième partie, petit intermède musical très court mais toujours très mignon avant d'arriver à la fin.
- "The back seat of my car" (McCartney) : McCartney clôt son album avec une chanson puissante et mélancolique à la fois, comme il a l'habitude de faire. Sa composition aurait début sous l'ère Beatles. Dans le sillage de "Oh Darling !", ou encore "Maybe I'm amazed" mais en plus léger tout de même, voici un morceau très réussi que John aurait encore pris pour lui. Le narrateur parle d'un voyage effectué avec sa petite amie, en route pour Mexico et écoutant de la musique. Tout n'est pas très clair mais cela finit par un refrain "we believe that we can't be wrong" (On croit que l'on ne peut avoir tort) sur lequel Lennon aurait tiqué. Ces deux amants ont fait qque chose de mal mais ne s'en rendent pas compte... Une chanson chorale pour clore un album déjà bien riche.
- "Another day"* (Paul & Linda McCartney) : En bonus sur l'album réédité, les deux chansons du single sorti entre "McCartney" et "Ram". Face A, nous trouvons cette adorable mélodie qui cache un texte assez triste. La chanson est à ranger dans le registre de celles où McCartney raconte une véritable histoire, souvent remplie de spleen. Ici, c'est celle d'une jeune femme au quotidien routinier et solitaire. Le jour où elle rencontre l'homme de sa vie, il la quitte le lendemain... Cela contraste donc particulièrement avec le rythme presque enjoué de la mélodie, absolument efficace. Mais Lennon s'en moquera dans "How do you sleep ?" en raillant le fait qu'il n'aurait composé que cette chanson de bien depuis "Yesterday". Méchant car McCartney ne rate pas sa cible ici avec un morceau vraiment réussi, très bon choix de single.
- "Oh Woman, oh why"* (McCartney) : Et une face B tout à fait honorable avec un rock roots, dans le même registre que "Smile away". McCartney fait encore état de tout son magnifique registre vocal ici, allant loin dans le raclage de gorge et les aigüs. Comme tout bon rock, le texte est simple. Le narrateur s'inquiète de voir sa bien-aimée avec une arme, lui demande pourquoi et tente de la faire culpabiliser. Mais on entend les coups de feu à la fin ! Musicalement, c'est fort, le rythme est bon, alternant lenteur et un peu plus de rapidité. Et bien entendu, on trouve déjà qques choeurs à la Wings.
Avec "Ram", les Wings sont indéniablement en route. McCartney offre toute sa palette de génie. Cela passe par ces orchestrations magnifiques, ces choeurs caractéristiques et toutes ces couleurs différentes, uniques à chaque morceau. C'est un festival de pop, de rock, de folk, tout y passe. McCartney règle ses comptes de manière détournée mais préfère se concentrer sur les plaisirs de la vie à deux et en famille. C'est une époque assez dure pour lui où il devait affronter les trois autres en procès et en prenait plein la tête dans cette position isolée. Malgré tout, il sort un album fort et rempli de fraîcheur simple.
Si "McCartney" était une bonne ébauche, "Ram", pas complètement fini non plus, apporte une énorme pierre au futur édifice construit par l'ex-Beatles en mal de reconnaissance. McCartney n'a jamais eu besoin d'être sur le devant de la scène pour faire des choses splendides et là, il réussit un coup de maître, rattrapant largement ses ex-camarades en termes de qualité.
"Ram" foisonne de belles choses, de tout ce qui fait Paul McCartney. Il est juste intouchable et inimitable, réussissant ce tour de bravoure quasiment à lui tout seul. L'artiste concentre tout ce qu'il y a de mieux en musique pop en lui-même. Si tout n'est pas parfait non plus, il a déjà une sérieuse avance sur tout le reste. "Ram" se situe exactement entre les Beatles et les Wings, une superbe transition.
Les morceaux à retenir : "Ram on", "Dear boy", "Uncle Albert/Admiral Halsey", "Smile away", "Heart of the country", "Monkberry moon delight", "The back seat of my car".
Avec "Ram", McCartney continue sa route post-Beatles en restant très roots. A l'image du diptyque "Plastic Ono Band-Imagine" de Lennon, le second étant une suite "orchestrée" du premier, on peut également voir une certaine continuité entre les deux premiers albums solos de Paul.
Comme pour Lennon, l'orchestration a été beaucoup plus travaillée ici. Mais "McCartney" était aussi beaucoup plus expérimental que "Plastic Ono Band" et "Ram" représente alors un véritable album avec douze chansons tout de même largement plus complètes que sur l'album précédent.
McCartney a donc continué à s'isoler dans sa ferme écossaise pour produire cette oeuvre avant de s'envoler pour New-York afin de l'enregistrer. Cette fois-ci, il n'a pas tout fait tout seul puisqu'il a recruté le batteur Denny Seiwell (futur Wings) et les guitaristes David Spinozza (qui collaborera peu de temps après avec Lennon et Ono) et Hugh McCraken (qui jouera avec de nombreux artistes au cours de sa carrière). Paul et Linda assure seuls la production.
"Ram" va vraiment lancer la carrière solo de McCartney, tout comme "Imagine" pour Lennon. Et cet album va faire particulièrement parler de lui. Sa qualité est indéniable, la touche McCartney est très présente et les Beatles ne sont pas très loin. Cependant, ce n'est que récemment que l'album a fait l'objet d'un véritable come-back sur la scène médiatique avec la presse rock le resortant des archives pour en faire l'éloge. "Ram" est alors devenu le chef d'oeuvre oublié de Paul McCartney dont on a retenu en solo que "Band on the run" ou presque.
Il fera aussi parler de lui au moment présent de l'époque puisque Lennon s'acharnera dessus avec véhémence. J'ai chroniqué "Imagine" avant "Ram" et pourtant c'est bien ce dernier qui est sorti en premier. Et dans "Imagine", Lennon répond furieusement à McCartney, se croyant insulté par son ex-compère. On en parlera dans le détail des chansons.
Lennon se vengera en chanson mais également visuellement. En effet, sur "Imagine", on trouve au dos une photo d'un John hilare en train de tirer les oreilles d'un énorme porc. Il parodiait avec facétie la pochette de "Ram" où l'on voit Paul en train de tenir un bélier (ram en anglais) par les cornes... Le packaging de l'album est très roots, à l'image du contenu. Il y a donc cette photo de couverture et tout autour, le fond, les côtés, sont coloriés, tendance orangée. Très enfantin. A l'intérieur, Il y a un patchwork coloré avec des photos de Paul surtout, dans diverses situations dont en studio. A l'arrière, du coloriage à nouveau et deux photos, l'une de Paul en famille, l'autre de deux scarabées en train de copuler, sans doute une allusion coquine aux Beatles... Les photos sont signées Linda, et les coloriages sont de Paul. Mouais.
"Ram" est assurément l'un des meilleurs albums solo de Paul McCartney, et en voici les chansons :
- "Too many people" (McCartney) : Première chanson de l'album avec d'ors-et-déjà un message fort, adressé à son vieux frère John. C'est l'une de celles que j'aime le moins parce que trop déstructurée, avec des petits bouts différents collés ça et là. Les parties vocales ne sont pas toujours très convaincantes. Musicalement, c'est mieux mais le premier solo de guitare est mou et raté, le second n'est pas vraiment plus réussi. Et la fin est complètement désordonnée. Mais au moins on sent bien que Paul a qque chose à faire passer. Ici, c'est une leçon qu'il veut donner à John notamment. Les paroles sont assez mystérieuses; Paul répétant ce "Too many people" (trop de gens) faisant ceci ou cela, indiquant cela comme un reproche. Et notamment prêchant la bonne parole comme John et Yoko. Il s'adresse sans doute à son ex-compère également quand il lui dit qu'il a eu de la chance mais qu'il a préféré s'en séparer. Je ne pourrais analyser chaque vers mais si littéralement, il n'y ni queue ni tête dans ce morceau, il y a assurément beaucoup de messages codés envers ses ex-compères et autres ennemis de Paul à cette époque. C'est ainsi une entame assez puissante, surtout concernant le texte, mais qui reste encore pas totalement aboutie selon moi.
- "3 legs" (McCartney) : ça se calme tout de suite après avec un petit blues tout mignon. Vocalement, c'est intéressant avec des choeurs toujours bien sentis et Paul chantant tantôt sous vocoder, tantôt de sa voix naturelle. Musicalement, c'est très simple, suivant le schéma classique d'un blues. Côté texte, Lennon s'est encore senti visé mais rien n'est moins sûr. Paul parle de son chien qui n'a que trois pattes et qui ne peut pas courir. Jusque là, rien de très insultant mais après il chante "Quand je pensais que tu étais mon ami / Quand je pensais que je pouvais t'appeler mon ami / Tu m'as laissé tomber". Et après il parle de mouches... Encore un texte à message, beaucoup plus métaphorique et poétique, qui sent bon la ruralité. Mais s'adressait-il à John ? Telle est la question... Loin d'être ma chanson préférée également. Cela ne commence pas très fort mais Paulo va vite se rattraper.
- "Ram on" (McCartney) : McCartney abandonne un peu ses rancoeurs et s'envole dans ce qu'il sait faire de mieux : un petit orchestre, du lyrisme, de l'amour et de la poésie... Chanson patchwork, on entend de tout, du piano, des dialogues, du ukulélé (avant George !), des choeurs sublimes, un sifflement... et un Paul chantant merveilleusement bien l'amour si cela en est. Il indique à qqu'un de donner son coeur à qqu'un d'autre. Un texte court mais dense en mystère... Ce morceau est un petit moment de bonheur tout simplement, une histoire de collage superbement mise en musique par McCartney. Du grand art.
- "Dear boy" (Paul & Linda McCartney) : Le lyrisme continue ici avec la première chanson vraiment bien finalisée de l'album, les précédentes possédant encore un petit côté bricolage. Ici, nous avons un morceau de pop pur, magnifique aussi bien vocalement (au vocoder avec des choeurs à tomber) et musicalement. C'est très homogène du début à la fin. Lennon a encore tiqué ici mais c'est beaucoup moins clair. L'auteur s'adresse à un jeune homme qui aurait manqué sa chance avec une fille et lui indique combien il a fait une erreur : "Je pense que tu n'as jamais remarqué, mon garçon, ce que tu avais trouvé / Je pense que tu n'as jamais remarqué qu'elle était juste la chose la plus mignonne qui soit / Je pense que tu n'as jamais remarqué ce que tu avais trouvé, mon garçon". C'est de toute beauté, un Paul imbattable ici, l'une de ses plus belles chansons. D'une durée de seulement 2 minutes.
- "Uncle Albert/Admiral Halsey" (Paul & Linda McCartney) : Une autre pièce maîtresse de "Ram" que ce petit medley concocté aux petits oignons. McCartney en a réalisé plusieurs durant sa carrière, commençant avec les Beatles (A Day in the Life, le medley d'Abbey Road) et poursuivant cette expérimentation en solo. Reprenant la bonne vieille sauce anglaise avec une ambiance à l'ancienne, Paul crée un véritable conte féérique de près de 5 minutes. Il y a donc ces deux personnages dans le texte. D'abord l'oncle Albert qui a l'air d'un vieux gâteux qu'on essaye de rassurer. Puis l'amiral Halsey intervient peu après. Encore un texte rempli de nonsense mais sur une orchestration divine et des choeurs enchanteurs. On passe d'une ambiance de manière très fluide. Totalement jouissif !
- "Smile away" (McCartney) : Comme d'habitude avec Paul, chaque morceau est unique et nous plonge dans une atmosphère différente du précédent. Ici, on retourne au rock roots sur une base assez classique mais tout à fait plaisante. McCartney prend sa grosse voix, sur des choeurs entêtants et tout charmants, et fait bouger tout le monde. Le texte est simple mais très comique. L'auteur raconte qu'il se baladait un jour dans la rue et qu'il a rencontré un ami qui lui a dit successivement qu'il puait des pieds, de l'haleine et des dents... Je ne sais pas qui dit "Smile away" à l'autre mais c'est viril. Musicalement, c'est très fourni et c'est très bon, avec un solo de guitare très sympa. On a souvent critiqué McCartney quand il se mettait à faire du rock mais là, il s'en sort très bien.
- "Heart of the country" (Paul & Linda McCartney) : Un autre bijou de "Ram" assurément. Avec le rock roots, voici une petite chanson folk, aux accents très rustiques. On sent bien Paul dans sa ferme écossaise en train d'enregistrer ce morceau. Il y chante merveilleusement bien les joies simples de la campagne. Le narrateur y cherche une maison et explique de manière poétique pourquoi. C'est court, épuré et efficace. Une merveille avec juste une guitare et une basse...
- "Monkberry moon delight" (Paul & Linda McCartney) : Et là encore, on passe de la simplicité même à la lourdeur symphonique. Lourd mais bon. Lourd comme l'ambiance heavy psychédélique de ce morceau incroyable. Paul change à nouveau de registre vocal, forçant ici un maximum sur les basses. C'est une chanson atypique une nouvelle fois, reposant sur un texte complètement foutraque mélangeant nourriture et instruments de musique. Paul est au sommet de sa forme et les choeurs évoquent déjà les futurs Wings (comme dans les précédentes chansons d'ailleurs). On apprécie la fin qui part en improvisation.
- "Eat at home" (Paul & Linda McCartney) : Retour à une petite chanson toute mignonne avec texte simplissime ("Chéri, viens manger à la maison") et rengaine imperturbable. Pas le morceau le plus difficile que McCartney ait eu à composer, dans la lignée de tout ces petites pièces faciles qu'il a composé tout au long de sa carrière pour remplir ses albums. Cela n'est pas forcément péjoratif que de dire cela car ceux-ci sont au moins efficaces bien que souvent anecdotiques. "Eat at home" est bien sympatoche, petit rock rythmé avec Linda aux choeurs, mais pas super renversant non plus.
- "Long haired lady" (Paul & Linda McCartney) : Un morceau déjà très Wings avec beaucoup de choeurs "naïfs", un peu enfantins. Paul rend sans doute ici hommage à sa belle avec un texte où il évoque une dame aux cheveux longs et aux yeux brillants. L'ambiance est très folk mais change ici aussi plusieurs fois de tons, notamment avec la partie "Love is long", sorte de refrain à part, chanté de manière répétitive. Mais l'amour reste au centre de la chanson. C'est un peu sans queue ni tête mais ça passe bien quand même avec une fin à la "Hey Jude" où l'orchestre monte petit à petit en puissance afin de s'éteindre.
- "Ram on" (McCartney) : Cela va devenir le petit jeu de McCartney, ajouter plus loin dans l'album une petite reprise alternative d'un morceau déjà entendu. Cela avait commencé avec Sgt Pepper. "Ram on" deuxième partie, petit intermède musical très court mais toujours très mignon avant d'arriver à la fin.
- "The back seat of my car" (McCartney) : McCartney clôt son album avec une chanson puissante et mélancolique à la fois, comme il a l'habitude de faire. Sa composition aurait début sous l'ère Beatles. Dans le sillage de "Oh Darling !", ou encore "Maybe I'm amazed" mais en plus léger tout de même, voici un morceau très réussi que John aurait encore pris pour lui. Le narrateur parle d'un voyage effectué avec sa petite amie, en route pour Mexico et écoutant de la musique. Tout n'est pas très clair mais cela finit par un refrain "we believe that we can't be wrong" (On croit que l'on ne peut avoir tort) sur lequel Lennon aurait tiqué. Ces deux amants ont fait qque chose de mal mais ne s'en rendent pas compte... Une chanson chorale pour clore un album déjà bien riche.
- "Another day"* (Paul & Linda McCartney) : En bonus sur l'album réédité, les deux chansons du single sorti entre "McCartney" et "Ram". Face A, nous trouvons cette adorable mélodie qui cache un texte assez triste. La chanson est à ranger dans le registre de celles où McCartney raconte une véritable histoire, souvent remplie de spleen. Ici, c'est celle d'une jeune femme au quotidien routinier et solitaire. Le jour où elle rencontre l'homme de sa vie, il la quitte le lendemain... Cela contraste donc particulièrement avec le rythme presque enjoué de la mélodie, absolument efficace. Mais Lennon s'en moquera dans "How do you sleep ?" en raillant le fait qu'il n'aurait composé que cette chanson de bien depuis "Yesterday". Méchant car McCartney ne rate pas sa cible ici avec un morceau vraiment réussi, très bon choix de single.
- "Oh Woman, oh why"* (McCartney) : Et une face B tout à fait honorable avec un rock roots, dans le même registre que "Smile away". McCartney fait encore état de tout son magnifique registre vocal ici, allant loin dans le raclage de gorge et les aigüs. Comme tout bon rock, le texte est simple. Le narrateur s'inquiète de voir sa bien-aimée avec une arme, lui demande pourquoi et tente de la faire culpabiliser. Mais on entend les coups de feu à la fin ! Musicalement, c'est fort, le rythme est bon, alternant lenteur et un peu plus de rapidité. Et bien entendu, on trouve déjà qques choeurs à la Wings.
Avec "Ram", les Wings sont indéniablement en route. McCartney offre toute sa palette de génie. Cela passe par ces orchestrations magnifiques, ces choeurs caractéristiques et toutes ces couleurs différentes, uniques à chaque morceau. C'est un festival de pop, de rock, de folk, tout y passe. McCartney règle ses comptes de manière détournée mais préfère se concentrer sur les plaisirs de la vie à deux et en famille. C'est une époque assez dure pour lui où il devait affronter les trois autres en procès et en prenait plein la tête dans cette position isolée. Malgré tout, il sort un album fort et rempli de fraîcheur simple.
Si "McCartney" était une bonne ébauche, "Ram", pas complètement fini non plus, apporte une énorme pierre au futur édifice construit par l'ex-Beatles en mal de reconnaissance. McCartney n'a jamais eu besoin d'être sur le devant de la scène pour faire des choses splendides et là, il réussit un coup de maître, rattrapant largement ses ex-camarades en termes de qualité.
"Ram" foisonne de belles choses, de tout ce qui fait Paul McCartney. Il est juste intouchable et inimitable, réussissant ce tour de bravoure quasiment à lui tout seul. L'artiste concentre tout ce qu'il y a de mieux en musique pop en lui-même. Si tout n'est pas parfait non plus, il a déjà une sérieuse avance sur tout le reste. "Ram" se situe exactement entre les Beatles et les Wings, une superbe transition.
Les morceaux à retenir : "Ram on", "Dear boy", "Uncle Albert/Admiral Halsey", "Smile away", "Heart of the country", "Monkberry moon delight", "The back seat of my car".
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