samedi 20 octobre 2012

Concert : Keane - Olympia

La dernière fois que j'ai été voir un concert "juste" pour la première partie, c'était en 2007 au Café de la Danse. Grâce à notre boulot pour Philippe Meyer, Antoine avait demandé des places pour écouter la douce Constance Amiot, alors en première partie de Da Silva. Ce qui était chouette, c'est qu'on avait pu certes apprécier la première partie, mais aussi la seconde !

Cette fois-ci, l'objet du désir était Agop (in Color), dont le leader, Fred Azilazian, n'est autre que le grand frère d'une amie du lycée, Audrey. Si j'ai bien suivi, ce petit groupe marseillais qui n'a pas encore d'album à son actif a tout de même réussi à décrocher la première partie de Keane à l'Olympia car ces derniers n'en avaient pas et que le son d'Agop leur a plu. C'est vraiment une belle histoire donc.

Audrey m'avait ainsi convié à venir, mais c'était complet et le fameux sésame est finalement venu de mon travail. Ouf ! Me voilà donc à me rendre à l'Olympia, une salle que j'adore, et puis aussi pour voir Keane, que je connais pas tant que ça, mais que j'apprécie bien.

La prestation d'Agop (in Color) fut bien encourageante, encore plus quand on connaît le détail de leur arrivée sur place, vers 17h, sans instruments ! Incompréhension entre le groupe et la salle qui a fait venir des instruments en urgence, mais plus que dix minutes pour répéter ! Au final, cette quasi improvisation ne s'est jamais fait ressentir durant leur performance, si ce n'est au niveau du son. Un larsen récurrent et des seconds micros bien trop bas ont un peu nuit à leur mise en valeur.

Autrement, musicalement, ce fut vraiment une belle découverte pour moi et Keane ne s'y est vraiment pas trompé. C'est dans une veine pop-rock, chantée en anglais, très classique, que j'aime particulièrement avec une voix nasillarde, mais pas désagréable pour le chanteur. Le reste du groupe se tient bien et l'apport pour qques morceaux d'une voix féminine (la femme du leader) donne encore un peu plus de charme.

Bref, une bien jolie prestation, sans fausse note et avec beaucoup d'assurance qui a bien plu au public de l'Olympia, et c'est toujours ça de pris. Puis vint le tour de Keane.  La dernière fois que je les avais vus, c'était à Rock en Seine en 2009 (oui, le jour où Oasis s'était séparé...), mais seulement 45 minutes et avec alors une audience bien molle du genou. Rien à voir cette fois-ci, je crois avoir rarement vu un tel engouement, bien gonflé par la forte présence britannique.

La mise en scène était très sobre et belle à la fois, avec un beau jeu de lumière. Et le désormais quatuor s'est lancé avec beaucoup d'enthousiasme dans un concert rondement mené, très pro et vraiment très bon de bout en bout. Le son était impeccable, un vrai bonheur offert par l'Olympia.

Je ne pourrais aller plus en détails dans la set-list car je ne connaissais vraiment que deux ou trois chansons, les premières qui les ont fait connaître sur la scène mondiale, dont l'excellent "Somewhere only we know" repris par toute la salle en choeur. Un public qui fut donc particulièrement bouillant car connaisseur, chantant avec facilité la plupart des morceaux. Ce bel entrain a touché Tom Chaplin, le chanteur, qui, je crois, reconnaissait avec sincérité qu'il avait face à lui l'un des meilleurs publics de leur tournée actuelle. Sauf qu'il est allé jusqu'à dire que les Français étaient meilleurs que les Anglais, ce qui n'a pas plu à la partie britannique, bien large, du public !

A part ça, musicalement, malgré les albums qui passent (quatre désormais), Keane conserve une forte homogénéité, une qualité comme un défaut, toujours sans guitare (sauf une chanson), mais cela reste un groupe solide, très agréable à écouter et la voix de Tom Chaplin, qui semble se durcir un peu avec les années, est toujours sa meilleure arme, puissante et mélodieuse. Il s'est particulièrement bien donné ce soir-là, mouillant littéralement le t-shirt et se montrant fort généreux.

Cette générosité se traduisit par un concert relativement long et un deuxième rappel improvisé devant l'insistance du public avec la reprise toute en maîtrise de "Under Pressure" de Queen et David Bowie, qui faisait partie de leur répertoire récent. Belle conclusion pour un concert vraiment énergique et marquant, qui aura été ainsi une belle surprise aussi bien en première qu'en deuxième partie.

lundi 17 septembre 2012

Black Cat White Cat - Bande originale du film Chat Noir Chat Blanc

Parmi les bandes originales de film, on a pu le voir, il y a un peu de tout. L'univers reste le même, collé au film, mais peut faire appel à divers sources musicales. Et parfois, quand la production est moins riche, on fait avec les moyens du bord.

C'est le cas de "Chat Noir Chat Blanc" d'Emir Kusturica, sorti en 1998, l'un de ses plus gros succès cinématographiques avec, comme d'habitude, une histoire d'amour entre deux jeunes, vivant au sein d'une famille et d'un univers complètement foutraques. Côté musical, le réalisateur serbe a fait appel à ses amis du No Smoking Orchestra qui a joué sous le nom de Black Cat White Cat une partition qui correspond parfaitement au lieu et au folklore du film.

Dans le livret qui accompagne l'album, rempli de photos du tournage, Emir Kusturica résume son ambition : "Je voulais montrer à quel point la musique gitane n'a besoin de personne pour vivre sa vie. Ici, elle s'approprie tous les genres, même les plus inintéressants. Ce qu'on obtient au final est une sorte de mélange entre la musique traditionnelle et le son cubain, une world music impossible à identifier précisément, libre en quelque sorte. Rien de plus normal en fin de compte puisque la musique des gitans est la synthèse de toutes les autres."

Tout est en place donc pour que nous passions en revue les différents morceaux...

- "Bubamara" : C'est LE morceau emblématique du film, structuré comme la plupart des morceaux de musique tzigane. Cela commence doucement puis s'emballe de plus en plus vite avec orchestre et choeurs. Il nous met directement dans l'ambiance et donne une indescriptible envie de se lever et faire frétiller ses gambettes.

- "Duj Sandale" : Ici, ça part directement à une vitesse effrénée sur une musique de jeu vidéo. Les pieds bougent naturellement et on s'imagine bien dans la folie du film. Le chant est très intéressant, avec un ton assez bas du chanteur qui contraste avec les aigus de l'orchestration. Accompagné d'une voix plus haute, cela aurait été encore plus sympa je pense.

- "Railway Station" : Morceau bien plus pépère, uniquement musical, qui rappelle un peu le "Bubamara" d'entrée. Il colle sans doute bien avec la scène qu'il doit accompagner, mais je n'en ai plus de souvenir, argh !  On ne danse pas vraiment ici, mais cela appelle bien au rêve, forcément foutraque.

- "Jek Di Tharin II" : L'ambiance n'est pas vraiment 100% tzigane ici. On se rapproche d'un rythme jazzy avec une vieille voix de crooner qui se lance dans une longue complainte. Avant que les choses ne s'accélèrent qque peu et touchent quand même le tzigane.

- "Daddy, don't ever die on a Friday" : Un super morceau, en accéléré, très axé sur les cuivres, presque rock parfois, et avec un chant en anglais cette fois. C'est toujours tonitruant et distrayant.

- "Bubamara" : Autre version du morceau phare du film. On nous la présente comme la version "Vivaldi" et c'est en effet le même morceau en musique classique, mais beaucoup plus court.

- "Daddy's gone" : Gentille petite ballade musicale à l'accordéon, qui fait un peu penser à du Yann Tiersen pour "Le Fabuleux destin d'Amélie Poulain". Mignon comme tout !

- "Long Vehicle" : La chanson la plus longue de la bande originale, dont l'intro dure quand même deux minutes ! C'est une nouvelle ballade bien tranquille jusqu'à ce qu'un chanteur  invite, en anglais, au voyage dans un "long véhicule", rejoint bientôt par des choeurs qui font très "marins" voire Monty Python.

- "Pit bull" : On entre ici dans une autre dimension avec un morceau electro, mixé par un certain Pink Evolution. C'est assez sombre et un peu daté, à l'image des chansons dance qui font encore fureur dans les boîtes de nuit des pays de l'est. Sans doute le morceau le plus faible de la bande originale.

- "El Bubamara pasa" : De retour avec notre morceau fétiche, mais cette fois dans une version 100% péruvienne avec flûte de pan ! Et le morceau est tellement bon qu'il passe encore une fois très bien, toujours aussi entraînant quand il s'emballe.

- "Ja volim te jos/Meine Stadt" : C'est une voix de diva féminine qui vient nous éclairer de la pénombre avec une charmante chanson à l'orchestration toujours bien marquée au niveau des percussions. Vers la moitié du morceau, une nette pause vient marquer la transition avec la même chanson mais chantée de manière plus rock voire ska et en allemand par un homme cette fois ! Et ça le fait tout aussi bien.

- "Bubamara" : Vous en voulez encore ? Eh bien revoici notre morceau fil rouge dans une mignonne petite version très courte et poétique.

- "Jek Di Tharin" : Même titre, sans le II, que le morceau déjà entendu plus haut. Mais l'ambiance est bien différente ici avec un choeur de vieux messieurs dans une atmosphère tout à fait tzigane.

- "Lies" : Encore un tout petit morceau qui ressemble vaguement à "Bubamara", sans l'être, à l'ambiance un peu mystérieuse.

- "Hunting" : C'est exactement la même mélodie que le morceau précédent, mais dans une version encore différente, plus orchestrée et joyeuse.

- "Dejo Dance" : Et rebelote ici, mais les cuivres sont encore plus mis en valeur et ça va peut-être même un peu plus vite.

- "Bulgarian Dance" : On ne s'arrête plus de vouloir bouger nos membres inférieurs avec une "danse bulgare" fort sympathique, très champêtre avec ses trompettes très prononcées.

- "Bubamara" : Vous en reprendrez bien une dernière louche ? A la sauce "Sunflower" cette fois. C'est encore un peu différent des autres version, mais pas tellement. Toujours aussi entraînant et seulement musical, avec pleins d'instruments différents, de la flûte de pan à la clarinette.

- "Black Cat White Cat" : On termine cette folle bande originale par un morceau qui reprend le titre du film. Le son reprend clairement le thème de la plupart des morceaux avec un ton très jazz band tzigane. C'est excellent, un bon morceau final. Et si on attend bien la fin de la chanson, on a même droit à un bonus caché, mais c'est de l'electro encore, pas terrible, très proche de "Pit bull" en fait.

Une bandes originale est toujours particulière et il est parfois difficile de se convaincre de l'acheter parce qu'elle colle généralement à une image que l'on n'aura pas juste en l'écoutant. Pourtant, celle de "Black Cat White Cat" réussi à retranscrire parfaitement l'atmosphère foldingue et terriblement attachante du film d'Emir Kusturica.

Les morceaux sont pour la plupart très rythmés et festifs, dotés d'une excellente orchestration et d'un chant inspiré, nous plongeant dans l'ambiance particulière des pays de l'est et d'une culture aussi riche que variée. C'est une très bonne approche de la musique tzigane qui, comme  le disait en préambule le réalisateur serbe, s'intègre parfaitement dans cette "world music" écoutable partout avec plaisir.

Cette bande originale a donc aussi facilement sa place dans une petite fête entre amis, histoire de déclencher qques pas de danse bienvenus si les voisins du dessous le permettent !

Les morceaux à retenir : "Bubamara" (toutes les versions!), "Duj Sandale", "Daddy, don't ever die on a Friday", "Daddy's gone", "Lies"/"Hunting"/"Dejo Dance",  "Bulgarian Dance", "Black Cat White Cat".

dimanche 16 septembre 2012

Concert : Nicolas Repac - Fondation suisse

Après avoir emmené mon ami Antoine (celui qui m'a fait connaître Marie Richeux, voir billet correspondant) écouter Bill Frisell la dernière fois, il a voulu me rendre la pareille avec un artiste que cette fois, je ne connaissais pas, mais lui oui. Il s'agissait de Nicolas Repac qui donnait un concert à la Fondation suisse (au sein de la Cité Internationale universitaire de Paris) dans le cadre des "Rendez-vous de la lune".

Ce bel homme, proche de la cinquantaine (mais qui fait dix ans de moins), a souvent oeuvré dans l'ombre des studios parisiens, jouant, arrangeant et produisant notamment pour Arthur H ou Maurane. Son instrument de prédilection, c'est la guitare, mais il aime à bidouiller le moindre petit objet qui produise du son. Depuis une dizaine d'années, il s'est affranchi de ses maîtres d'oeuvre afin de mener lui aussi sa barque en solo le temps de qques albums dont le dernier est sorti cette année.

Mais ça, je ne le savais pas avant de le voir. Le lieu était très sobre, clairement pas une salle de concert, tout le monde au même niveau, pas de scène, avec des chaises, tabourets ou encore fauteuils (pour les plus chanceux) pour les spectateurs. Nicolas Repac s'est présenté seul, entouré d'un ordinateur portable (essentiel), de qques pédales à tout faire, de deux guitares (électrique, acoustique) et de divers petits instruments de percussions (dont un éventail !).

Sa musique est difficile à décrire, cela va du blues à la musique africaine, en passant vaguement par l'électro. Mais c'est essentiellement dans les racines des deux premières citées que Nicolas Repac nous transporte dans son univers, où il compose quasiment chaque morceau petit à petit, devant nous, ajoutant au fur et à mesure les lignes instrumentales ou vocales (pour la majorité enregistrées dans l'ordinateur, lui se contentant de psalmodier de temps à autre).

Ce côté préfabriqué fait penser aux expériences de Manu Chao ou plus encore, parfois, de Moby pour sa modernité (la reprise de "Black Betty" n'aurait pas été reniée par le chauve new-yorkais). Les morceaux sont ainsi très prenants, et la valeur ajoutée ultime de Nicolas Repac est bien entendu sa guitare dont il joue extrêmement bien, que le registre soit jazzy ou bluesy, ou même plus rock.

C'était ainsi une belle découverte malgré la raideur du lieu et les qques déconvenues, souvent cocasses, entre une guitare électrique sans électricité et un ordinateur qui bugge, faisant sauter tout le morceau, et forçant surtout notre incrédule artiste à tout recommencer depuis le début, mais avec le sourire. Bravo en tout cas à ce véritable homme-orchestre du 21e siècle.

samedi 8 septembre 2012

Concert : Coldplay - Stade de France

Le plus "beau" concert de ma vie. Oui j'ose le dire, j'ai assisté au show le plus époustouflant visuellement qu'il m'a été donné de voir. Mais avant, revenons sur plusieurs points.

Depuis le colossal succès de "Viva la vida", Coldplay poursuit sa route bien tranquillement. Pas sûr que leur dernier album, "Mylo Xyloto", soit aussi flamboyant dans les ventes, mais au moins, ça consolide leur pleine entrée dans un autre monde, celui d'un super groupe qui rafle toujours plus de public sur son passage. 

Mon dernier concert de Coldplay, c'était au Parc des Princes, il y a trois ans, et je me souviens que ce passage en grand format m'avait marqué. J'évoquais déjà le Stade de France, prochaine étape à coup sûr. C'est enfin arrivé, après un Bercy, je crois, que j'ai raté. Ce concert-là aussi, je n'étais vraiment pas certain d'y aller et puis finalement si, en tribune, loin mais pile en face de la scène. 

Au Parc des Princes, il y a avait eu deux premières parties, là une seule : Marina & The Diamonds. Soit une diva plutôt sympa qui chante du pop/rock. Ses envolées lyriques étaient parfois un peu aiguës et grinçantes, mais globalement, c'était une découverte intéressante. Bien bien. 

Place ensuite au grand spectacle et tout le monde en a eu pour son argent, vraiment. Chacun des spectateurs portait un bracelet donné gratuitement et qui allait s'illuminer d'une couleur différente à divers moments du concert. Sans oublier le flot de lumières, de ballons géants, de confettis ou encore de feux d'artifice en continu. Vraiment très impressionnant. Je n'avais jamais vu ça avant. 

C'est en ça que ce fut mon plus "beau" concert. Pour le reste, du grand classique je dirais avec un son évidemment poussif en stade et parfois brouillon sur certaines chansons plus rock. La playlist a laissé une large place aux deux derniers albums, sans oublier qques grands classiques des précédents (les meilleurs). Comme il n'y a pas eu "The Hardest part", mon meilleur moment fut "The Scientist" ou encore "Fix You".

L'autre grand moment, même si ça ne m'a fait ni chaud ni froid, c'est la venue de Rihanna sur scène afin de partager son duo du dernier album avec le groupe. Cela devait être tellement exceptionnel qu'ils l'ont chanté deux fois de suite... Bon... et elle est revenue un peu plus tard pour jouer son "Umbrella" en quasi acoustique. 

Deux fois aussi l'interprétation du dernier tube de Coldplay, "Paradise", mais cette fois parce que la deuxième prise devait aller directement à la télévision américaine pour une émission de lutte contre le cancer. J'ai donc préféré des playlists précédentes, mais ça a filé pas mal, un peu trop vite quand même, comme toujours. 

Pour sa part, Chris Martin s'est bien donné, n'évoquant pas son "français de merde" cette fois-ci, mais n'hésitant pas à en faire des tartines sur nous, le "meilleur public du monde", pour leur "meilleur concert" jamais donné. Ouais, ouais, à d'autres. M'enfin, il y eut aussi ce petit passage sur une mini-scène plantée au milieu du public, toujours un joli moment où le batteur, Will Champion, peut nous gratifier de sa très belle voix. 

Au final, je ne pense pas que ce fut le meilleur concert de Coldplay musicalement parlant que j'ai pu voir, mais le plus "beau", oui, assurément. Et là, tous artistes confondus. Les moyens sont là et autant en profiter. Alors un grand merci à toute cette production, on n'est pas venu pour rien. 

samedi 1 septembre 2012

Concert : Bill Frisell - Cité de la Musique

Je ne suis pas vraiment fan de jazz, mais lorsque j'ai vu qu'on jouait du John Lennon au festival "Jazz à la Villette", je n'ai pas hésité une seconde. De plus, je ne connaissais de la Cité de la Musique que son espace d'exposition où j'avais pu voir celle très belle consacrée à l'ex-Beatles, justement, il y a qques années. Là, j'ai pu tester cette fois la salle de concert sobre, confortable et à la formidable acoustique.

Je ne connaissais donc pas du tout ce Bill Frisell, malgré une grosse réputation dans le milieu du jazz bien évidemment. C'est un guitariste qui s'est spécialisé ces derniers temps dans les reprises pop-rock assaisonnées à la sauce jazz, et sans chant. Que de la musique.

En première partie, un saxophoniste au CV lui aussi bien chargé : Colin Stetson. Cet Américain a joué pour pas mal de grands noms de la pop actuelle dont Feist, Arcade Fire ou encore Bon Iver. Son entrée fut assez tonitruante avec de grands barrissements à l'aide d'un saxophone surdimensionné. Tout seul sur scène, il réussit, même avec un seul instrument, à offrir des morceaux aux tons variés et multiples. Il tape, il souffle, il rugit, sans doute aidé de qques pistes sonores pour ajouter de lointains et obscurs murmures. Je ne saurais classer son style, mais disons qu'il s'agit de jazz expérimental et, si tout n'est pas agréable à écouter, le résultat est globalement intéressant. On est surtout impressionné par sa technique et son souffle ininterrompu.

L'entracte se fit au son de la B.O. de "Yellow Submarine", composée par George Martin. Une bonne augure. Puis vint Bill Frisell et son groupe, composée de pointures du jazz là aussi, ayant tous travaillé pour des noms connus, tels Norah Jones et autres. Nous avions donc un excellent batteur (sosie de Mac Lesggy au passage), subtil et léger, un admirable joueur de steel guitar ainsi qu'un bon bassiste. Plus Bill Frisell, assurément grand guitariste.

Au départ, comme je pensais que les morceaux de John Lennon pourraient être véritablement remaniés de façon jazz, je me suis pris au jeu des devinettes, sachant que l'introduction de ceux-ci était régulièrement mystérieuse. Mais, au fur et à mesure, la mélodie originale prenait sa place et la reconnaissance se faisait plus facile. Malheureusement, rebelote pour la fins des morceaux, souvent à la limite de l'improvisation et particulièrement confuse pour certains, sans idée de fin.

Cependant, on assista à de très belles reprises, notamment de "Beautiful Boy", "In my Life", l'enjouée "Please Please Me", "Come Together" et surtout "Julia", toute en grâce et volupté. Il faut préciser que la majorité des morceaux repris étaient en fait ceux composés par Lennon au sein des Beatles. Il n'y eut que "#9 Dream" et "Imagine" (en plus de "Beautiful Boy"), issus de la carrière solo du Liverpuldien.

La performance fut donc sympathique, très bien jouée, même si ce petit monde donnait l'impression de jouer pour eux plus que pour le public, très proches les uns des autres et Bill Frisell de profil, tournant le dos à une partie des spectateurs dont je faisais partie, sur le côté droit de la scène. Un peu dommage. Deux rappels tout de même, pour "Imagine", puis "Nowhere Man".

On salue l'initiative plutôt originale de Bill Frisell et le rendu intéressant dans son ensemble, même si, la plupart du temps, les paroles manquent terriblement sur ces mélodies splendides et indémodables. Alors au public de fredonner doucement les refrains et d'avoir en mémoire l'âme d'un des plus grands artistes de notre temps.

mardi 3 juillet 2012

Concert : Alanis Morissette - Zénith

Depuis le temps que mon boulot nous propose des places de concert, il fallait bien que j'en profite. C'est donc muni d'une invitation que je me suis rendu dans ce Zénith que j'aime bien pour écouter la chanteuse et de plus en plus actrice ("Nip/Tuck", "Weeds", etc.) canadienne Alanis Morissette.

Mine de rien, cela fait bien vingt ans que ce petit bout de femme balade ses mélodies pop-rock et sa voix unique à travers le monde. C'est à l'occasion d'une tournée européenne qu'elle nous rendait donc visite. Je ne suis pas un fan accompli, mais j'aime assez ses chansons les plus connues.

Je suis arrivé sur place juste pour le début du concert où, apparemment, aucune première partie n'était prévue. Peu bavarde ("Tu m'as manqué" et "Merci/Thank you" pour seules paroles échangées avec le public), Alanis Morissette a enchaîné les morceaux sans temps mort. C'était très pro et formaté, et, malgré la qualité des chansons et de leur interprétation, cela manquait singulièrement de chaleur.

Mais le public était particulièrement présent, répondant parfaitement à l'appel sur les tubes les plus connus de la Canadienne, et cette dernière est ainsi revenue à deux reprises pour les rappels. Sympa. A part ça, on a pu constater qu'Alanis Morissette tenait encore une voix solide et capable de varier les tons à sa guise. La chanteuse a alterné les guitares, donnant aussi quelques coups d'harmonica. Mais elle a aussi interprété quelques morceaux sans instruments, longeant le bord de scène de droite à gauche et inversement, sans arrêt... On se serait cru à Roland-Garros.

Le son était parfois saturé et les rares moments où l'on a pu entendre vraiment son chant avec des accompagnements moins forts ont été particulièrement appréciés. Au final, c'était un bon concert, avec de bonnes chansons, allant des plus anciennes aux plus récentes, sans oublier aucune incontournable, mais manquant de la proximité et du contact que l'on attend un minimum des artistes sur scène.

jeudi 21 juin 2012

Concert : Ayo. - Café de la Danse

Si je compte bien, cette nouvelle performance live d'Ayo. devait être la 17e que j'ai vu... Oui, ça fait beaucoup, record à battre. Et encore, je pense que j'ai zappé (volontairement) une ou deux courtes prestations, donc on doit plus approcher les 19 voire 20 !

Mais là, ça faisait assez longtemps que je ne l'avais pas vu pointer le bout de son nez sur scène, si on excepte justement un showcase à la Fnac et un petit show VIP pour la réouverture d'une boutique Morgan sur les Champs-Elysées. Et ça, donc, je ne vous en avais pas parlé, parce qu'il ne s'agissait pas de concerts à proprement parler.

Bref, la dernière tournée d'Ayo. par chez nous, c'était l'an dernier pour assurer la promotion de son 3e album, "Billy-Eve". Un an plus tard, la grande chanteuse a visiblement changé de cap, de petit ami et s'offre un petit tour estival pour se remettre dans le bain avant de sortir prochainement un 4e album.

Elle l'a d'ailleurs un peu évoqué sur la scène du Café de la Danse, l'une des scènes de ses débuts, petite, avec une grande proximité avec le public (que j'avais déjà essayé une fois, en 2007, pour voir Da Silva). Dans ses grandes prises de parole, désormais légendaires, Ayo. a en effet semblé touchée par, selon elle, un certain échec de "Billy-Eve" et du besoin de passer à autre chose. Du coup, elle fait table rase du tout "électrique" pour amorcer une série de concerts "acoustiques", avec un pianiste, une contrebassiste (et guitariste) et un batteur.

Avant cela, la salle, déjà comble, a goûté de nouveau aux douces ballades de la franco-australienne Emilie Gassin, déjà première partie d'Ayo. il y a deux ans, lors de son dernier Olympia. Celle-ci n'a pas changé son répertoire, toujours plus ou moins le même, gentil, sympa, mais pas de quoi casser la baraque non plus.

Celui d'Ayo. fut assez intéressant, serré, avec une majorité de chansons de son premier album dont le fameux "Down on my knees" qu'elle aurait bien zappé vu sa réaction quand le public l'a demandé en choeur. Ayo. craint de finir comme Gloria Gaynor avec "I will survive". Elle n'a pas tort, maudit public.

Pour le reste, c'était donc du grand classique, toujours bon et enjoué, avec de nouveaux (sauf le pianiste de ses débuts) et (toujours aussi) excellents musiciens. L'artiste a donc encore beaucoup bavardé, parfois en chantant, et on a senti un certain côté improvisé, tantôt mignon tantôt agaçant car occasionnant de sérieuses pertes de temps. Pas de rappel par exemple !

Mais il y eut tout de même d'autres jolis moments comme cette séquence passée au sein du chaleureux public pour reprendre du Bob Marley, cette invitation sur scène de deux chanteuses amateurs issues de ce même public pour l'accompagner sur "Down on my knees" puis son fils Nile à la batterie ou encore ces deux ou trois nouveaux morceaux qui s'annoncent très bien.

Au final, ce n'était pas son concert le plus abouti, on a senti beaucoup de flottement, mais ça faisait aussi partie du charme d'une artiste qui laisse beaucoup de place à la liberté et à la créativité. Ayo. distille également toujours autant de fraîcheur et de bonne humeur qu'il est difficile de lui reprocher quoi que ce soit de grave. Espérons qu'elle garde la voix et la musique, ses principaux atouts, et qu'elle poursuive sa route avec optimisme.

dimanche 10 juin 2012

Concert : Garland Jeffreys - Divan du Monde

Il y a une semaine, l'un des vétérans du rock des années 1970, Garland Jeffreys était de passage à Paris dans le cadre d'une petite tournée européenne vantant les mérites de son dernier album en date.

Son nom ne vous dit sans doute pas grand chose, mais ce petit bonhomme a vécu dans l'ombre des plus grands. Camarade de classe de Lou Reed, il a oeuvré dans son sillage ainsi que dans celui de Bruce Springsteen, Paul Simon, Bob Marley ou encore Bob Dylan. De toutes ces amitiés, Garland Jeffreys a retiré beaucoup d'influence et un style du coup très polyvalent, allant du rock brut au reggae en passant par de la pop exotique.

Le rocker new-yorkais a traversé les décennies tranquillement au rythme d'une douzaine d'albums, de plus en plus espacés au fil des années. Pour ma part, c'est par hasard, grâce à son plus gros tube, "Wild in the streets", que je l'ai connu, il y a environ trois ans. C'est pour moi l'une des meilleures chansons rock de tous les temps, rien que ça.

Alors quand j'ai aperçu que le petit (et gros, les années passent) Garland était dans la place, je n'ai pas hésité, d'autant plus que le concert avait lieu au Divan du Monde, une petite salle que j'aime beaucoup pour la proximité idéale donnée au public d'avec l'artiste. Si vous m'avez bien lu, c'est là que j'avais vu Jeff Lang. Lors de ce dernier concert, j'avais pu rencontrer Tété dans le public (Jeff Lang avait été sa première partie à l'Olympia). Cette fois, c'est Antoine de Caunes qui était parmi nous, grand fan (et ami ?) de Garland Jeffreys depuis toujours.

En première partie, nous avons eu droit à un duo en solo. Le chanteur d'In Between, Frédéric, nous a expliqué que normalement ils étaient deux, mais pas ce soir-là. Ils sont évidemment français, chantant en anglais. Bon, ça chante bien, c'est du folk tout doux, tout mignon, mais quel ennui ! En plus, les chansons avaient toutes des titres hyper recherchés ("Home sweet home", "Song with no name", "The power of music"...) et ne parlons pas des paroles, vraiment simples et naïves. Bref, merci de l'effort, mais il y a encore du boulot.

A côté, Garland Jeffreys a fait l'effet d'une bombe et a déchaîné un public fort anglo-saxon et fort âgé, il faut bien le dire. Avec un super groupe (un guitariste old school à la Keith Richards, enchaînant les bières, un batteur placide tout aussi de la vie vieille et deux plus jeunes aux claviers et à la basse), le New Yorkais a tout donné, se mettant en transe sur chaque chanson qui, si je ne les connais pas toutes, étaient aussi bien récentes que plus anciennes.

La folie l'a gagné jusqu'à descendre chanter son rock jusque dans le public à deux reprises, même si la remontée sur scène fut loin d'être facile ! Je n'avais pas vu ça depuis Ayo., c'est dire l'événement ! En tout cas, énorme performance du vieux rocker qui nous a livré son répertoire avec bonheur, intensité et même deux rappels (dont un joli dernier avec son tube exotique, "Matador", joué à la guitare acoustique). Même si je ne connaissais pas tout, j'ai pu vibrer sur chaque chanson avec un climax, forcément, sur "Wild in the streets".

Je n'ai finalement pas eu souvent l'occasion de voir de vrais concerts de rock'n'roll dans ma vie et celui-là, dans une petite salle chauffée à blanc, a été juste exquis. L'ambiance anglo-saxonne m'a transporté ailleurs, avec Garland Jeffreys, au coeur d'un New York des années 1970 chaud comme la braise. Ce concert restera assurément comme l'un des meilleurs auxquels j'ai pu assister. Du grand show avec peu de moyens. Chapeau. 

lundi 16 janvier 2012

Abd Al Malik - Château Rouge (2010)

Abd Al Malik est un garçon que j'aime bien, que ce soit son personnage ou sa musique (globalement). A vrai dire, je n'ai connu que ses grands succès, paru sur "Gibraltar", puis c'est "Ma Jolie" qui m'a poussé à piquer ce dernier album, "Château Rouge", sur une table où figuraient pleins d'autres biens culturels.

Le slam, c'est intéressant, même si ce n'est pas plus mon truc que le rap. Et là, sur cet album, Abd Al Malik s'oriente justement plus vers quelque chose qui me fait penser largement à MC Solaar, avec de la variété dans le phrasé adopté. Parfois lent, parfois rapide, parfois chanté.

Maintenant, je ne vais pas pouvoir vous analyser plus que ça le pourquoi du comment, parce que je ne connais que cet album. On verra plus tard pour le reste. En attendant, parlons donc de "Château Rouge".

On apprécie la pochette avec Abd Al Malik qui pose, classe et serein sans regarder l'objectif, devant une sorte de magasin de tissus de toutes les couleurs, à l'image des boutiques colorées du quartier de Château-Rouge (d'où le titre de l'album, également de la dernière chanson du disque), et un néon (c'est un autre morceau de l'album), au-dessus de lui, indique son nom.

A l'intérieur du livret, de jolies photos ainsi que les (longs) textes des (longues) chansons de l'album que nous allons détailler gaiement.

- "Valentin" (Abd Al Malik / Bilal) : L'album s'ouvre avec un morceau plutôt bien rythmé, écrit avec son grand frère Bilal, mais pas très gai. Le chanteur évoque un enterrement... Celui du Valentin du titre, son grand-père, qui se déroule à Brazzaville, où a grandi Abd Al Malik. Le texte est assez intéressant, sur le souvenir et la mémoire, la musique aussi, un bon morceau mais aux tonalités vraiment mélancoliques.

- "Ma Jolie" (Abd Al Malik / Wallen) : Heureusement, ce deuxième titre, qui s'enchaîne sans transition avec le premier, vient donner un peu plus de fraîcheur. Enfin c'est ce que l'on croit si on s'en tient à la musique, hyper enfantine et rythmée, taillée pour en faire un single. L'histoire, c'est celle d'un gamin qui supplie sa "jolie" de lui revenir. Pendant trois couplets, tout est dans la reconquête, avant qu'intervienne le vrai visage du narrateur, violent et qui a vraisemblablement déjà frappé sa "jolie"... Sa soeur lui interdit alors de le revoir d'où la supplique... Un titre, coécrit avec Wallen, artiste et épouse d'Abd Al Malik, qui colle bien avec l'esprit adolescent d'aujourd'hui où on peut faire rêver avec des sacs Gucci et de la muscu. Un très bon titre où le slammeur manie bien le chant et son texte, dur, contrastant avec la musique joyeuse.

- "Miss America" (Abd Al Malik / Bilal) : Je suis moins fan de ce morceau, notamment du chant, très proche de celui du MC Solaar quand il est le moins bon, et de la musique, qui fait années 1980 et enfume le tout. Côté texte, c'est plutôt bien vu, critiquant les jeunes filles, Madame Bovary modernes, qui ne jurent que par ce qu'elles lisent dans les magazines people et s'inventent un style totalement superficiel, d'où le "Miss America" du titre. Dommage que l'enrobage soit moins bon que le texte, même si celui-ci n'est pas non plus très original.

- "Mon amour" (Abd Al Malik / Wallen) : On reparle d'amour ici, en anglais pour Wallen et en français pour Abd Al Malik. Wallen donne donc de la voix, mais on entend bien que l'anglais n'est pas sa langue maternelle. Ce qu'elle chante n'est pas non plus très profond: "My baby is a hero no matter what he shows/He's so much better than he knows". Son alter ego n'a pas non plus un texte très bon, se comparant à Adam et Eve. Et le son un peu électro n'arrange rien. C'est pas complètement nul, mais c'est assez banal et on a connu des chansons d'amour plus romantiques et transportantes.

- "Le Meilleur des mondes/Brave new world" (Abd Al Malik/Primary1/Bilal) : Passons à un morceau philantropique. Dès qu'Abd Al Malik se met à chanter, à toute vitesse, ça se gâte... c'est presque faux et le refrain est naze à souhait ("Pleurer sur ce dance-floor étrange d'autres y dansent/Vivre dans le meilleur des mondes, mondes"). Il y est rejoint par Primary 1, en anglais, et ça n'arrange rien. Des paroles à la musique, c'est encore du synthétique dégoulinant. Un morceau vraiment raté et chiant.

- "Dynamo" (Abd Al Malik/Ezra Koenig/Wallen) : Voilà un titre déjà beaucoup plus intéressant, ne serait-ce que grâce au texte, splendide évocation de la jeunesse d'Abd Al Malik qui raconte ses souvenirs de vélo avec son frère et ses amis dans la cité. Le chanteur nous offre le premier vrai slam de l'album et on est conquis. Le refrain est chanté en français par Ezra Koenig, le chanteur de Vampire Weekend, rien que ça. Cela donne un certain charme avec une musique toute douce et poétique. Bravo donc.

- "Centre ville" (Abd Al Malik/Wallen) : Ici, Abd Al Malik nous fait visiter Paris avec ses yeux de slammeur. Encore un morceau séduisant avec un refrain chanté de manière mécanique, évoquant la capitale comme la ville de la seconde chance. Musicalement, c'est pas mal non plus, presque pop. Abd Al Malik est vraiment meilleur que quand il slamme. Et c'est donc ce qu'il fait ici, de la gare de l'Est à Saint-Lazare en passant par Châtelet et le Sentier.

- "Goodbye Guantanamo" (Abd Al Malik/Bilal) : Un peu plus d'énergie dans ce morceau, beaucoup plus sombre du côté des paroles, largement abstraites et qu'on a bien du mal à lier au titre qui fait office de refrain. Je pense que l'auteur joue sur le contraste de l'espérance et de l'idéal, trahi par des lieux comme Guantanamo. Musicalement, c'est intéressant, toujours électronique mais entraînant avec notamment une insistance sur les percussions.

- "Neon" (Abd Al Malik/Mattéo Falkone/Bilal) : Ce titre n'est pas beaucoup plus éclairant, malgré une thématique lumineuse déclinée à toutes les sauces, mise en rapport avec la vie et l'existence. Abd Al Malik fait jouer sa voix lancinante, tranchée en fin de morceau par une apparition du rappeur Mattéo Falkone, qui a déjà travaillé avec Bilal et Wallen. Pas grand chose de dire de plus sur une chanson sombre, encore alimentée par un son vaguement 80's. On n'est pas trop fan.

- "We are still kings" (Abd Al Malik/Wallen) : Et voici un titre entièrement en anglais (mis à part une phrase dans un dialecte africain pour les jolis choeurs aigüs). Abd Al Malik s'y emploie tout seul ici et il s'applique, mais ce n'est pas non plus trop son truc, l'accent français se faisant souvent bien entendre, exprès ou pas. Mais on aime la tonalité africaine de ce titre, fraîche et jolie, qui compense ces problèmes de diction. Côté paroles, c'est encore un peu confus, le chanteur évoquant notamment ses racines et son statut.

- "Rock the planet" (Abd Al Malik/Cocknbullkid/Wallen) : Encore un morceau bilingue, avec Abd Al Malik pour le texte français et la Britannique Cocknbullkid pour l'Anglais, soit le refrain. C'est très varié musicalement, aussi bien africain pour les couplets slammés avec la belle voix grave d'Abd Al Malik que pop pour le refrain chanté joliment par Cocknbullkid. Un très bon petit titre dont la tristesse des paroles tranche avec l'espérance de la musique.

- "SyndiSkaliste" (Abd Al Malik/Wallen) : Comme son titre l'indique, cette chanson est rythmée comme un ska et les paroles parlent des luttes populaires et des espoirs optimistes des gens. Wallen redonne de la voix pour les refrains et ça sonne très bien, le tout se mariant très bien ensemble. Chouette!

- "Ground Zero (Ode to love)" (Abd Al Malik/Papa Wemba/Wallen) : Le slammeur reprend la langue anglaise ici et c'est toujours aussi peu convainquant. Quel intérêt, franchement? Pour cacher (un peu) un texte consacré à la religion (musulmane) et que le titre évoque le 11-Septembre? Il n'y avait rien de honteux à ça pourtant sauf s'il veut s'adresser à son public anglo-saxon, s'il existe... Les interventions du célèbre chanteur congolais, Papa Wemba, en dialecte africain, apportent heureusement une petite échappée africanisante une nouvelle fois bienvenue. C'est dommage parce que le morceau est plutôt joli, bien rythmé, mais l'horrible accent d'Abd Al Malik vient presque tout gâcher.

- "Château Rouge" (Abd Al Malik/Gérard Jouannest) : On termine l'album avec le morceau-titre, long fleuve (plus de 12 minutes!) tranquille. Accompagné au piano par Gérard Jouannest, pianiste de Jacques Brel et époux de Juliette Gréco, Abd Al Malik conclut avec un slam classique, racontant les destins croisés d'habitants du quartier parisien de Château-Rouge. C'est simple et bien raconté, comme le slammeur sait si bien le faire, avec un très belle partition au piano qui suit parfaitement le cours et le rythme du récit.

On referme ainsi cet album de manière apaisée alors que l'ensemble est plutôt rythmé. On sent qu'Abd Al Malik explore toujours plus de pistes, variant les plaisirs, les duos et chantant même presque plus que ce qui l'a fait connaître, le slam.

Si on n'est pas toujours très convaincu de son chant, qui ne s'accorde pas toujours bien à la musique, pas toujours réussie elle non plus, l'artiste se montre irréprochable justement sur les quelques slams de l'album. C'est vraiment sa force et il le confirme une fois de plus.

On aurait aussi voulu qu'il nous épargne ces quelques essais en anglais, mais bon, il va jusqu'au bout du touche-à-tout et on ne peut pas tout réussir. Globalement, Abd Al Malik offre malgré tout un album bien rempli qui pourrait gagner encore en diversité, mais qui se tient très bien sur la longueur malgré quelques morceaux banals. On est surtout curieux de découvrir la suite et aussi le passé, pour comparer.

Les morceaux à retenir : "Valentin", "Ma Jolie", "Dynamo", "Centre Ville", "Goodbye Guantanamo", "We are still kings", "Rock the planet", "SyndiSkaliste", "Château Rouge".